CRÉTEIL (94) : cimetière communal
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Ouvert en 1822, le cimetière de Créteil est de taille relativement modeste. On y pénètre par un espace funéraire militaire intermédiaire comprenant, outre le monument aux morts, plusieurs autres monuments à caractère commémoratifs, en particulier l’ancienne porte de la prison du Cherche-midi.
Dans les allées de la partie ancienne du cimetière, quelques vieilles chapelles de la bourgeoisie indusctrielle de la ville au XIXe siècle ont été conservées et classées. Ce cimetière ne brille ni par son cadre quelconque, ni par l’absence quasi-totale d’oeuvres d’art. La visite n’en est pas moins agréable, et il contient quelques tombes dignes de capter l’intérêt des taphophiles.
Curiosités
A l’entrée du cimetière, un vieux puits anachronique accueille les visiteurs.
Le monument commémoratif le plus intéressant du cimetière est sans conteste une porte massive, dont l’histoire mérite d’être contée : en 1966, un conseiller municipal de Créteil et ancien résistant, apprend par l’un de ses amis, fonctionnaire au ministère de la Justice, la démolition de la prison militaire du Cherche-Midi. Il se rend sur le chantier et achète, pour cinquante mille francs, les portes monumentales de la prison parisienne par lesquelles sont passés tant de prisonniers militaires, politiques et résistants… Il les fait venir à Créteil et les cède à la section du Souvenir Français de la ville. Un projet de monument commémoratif de la Résistance dans lequel ces portes seraient intégrées est évoqué, en particulier par le Général Pierre Billotte, député-maire de Créteil, mais celui-ci tarde à se concrétiser. C’est en 1980, sous l’impulsion de Laurent Cathala, nouveau député-maire, que le projet prend forme et, par délibération du 30 septembre 1982, il est décidé d’ériger sur l’esplanade du Souvenir, près du cimetière, « un monument pour l’installation des portes du Cherche-Midi ». Le monument est inauguré le 11 novembre 1982. Dans son sillage a été créé le Comité National du Mémorial du Cherche-Midi. Il a pour objet de reconstituer l’histoire de cette prison militaire et de dresser la liste de celles et ceux qui ont été jugés et condamnés pour faits de résistance par le tribunal militaire allemand qui siégea dans la prison de juin 1940 à août 1944. Chaque année depuis 1987 le premier dimanche d’octobre, au fur et à mesure qu’ils sont connus de façon précise, les noms des résistants disparus sont gravés sur le Mémorial : il y en a pour l’instant 107, identités alignées de part et d’autre de la porte. Parmi ses noms, certains ne sont pas oubliés (Honoré d’ESTIENNE d’ORVES, Jan DOORNIK, Gabriel PERI...), un nombre important de ces fusillés étant devenus des Compagnons de la Libération à titre posthume.
Près de la porte, le monument aux morts fut érigé en 1921 par l’ entrepreneur L. Bardet à la suite d’ un concours remporté par le sculpteur Alexandre Descatoire.
Un ossuaire perpétuel, commémorant la mémoire de ceux dont les tombes ont disparu.
La tombe de la duchesse de la Force, née Georgina Harriet Smythe (elle était la nièce de l’épouse morganatique du roi Georg IV d’Angleterre). Elle mourut en 1867, assassinée par son cocher !
La stèle de Théodore Lancelot du Lac (+1879), qui fut garde du corps de Charles X.
La tombe Félix, et son Christ montrant le Sacré Coeur, l’une des rares statues du cimetière.
Les célébrités : les incontournables...
Aucune
... mais aussi
Le général François Gédéon BAILLY de MONTHION (1776-1850) : originaire de la Réunion, il servit aux armées de Moselle et du Nord, puis fit ensuite partie des Armées de l’Ouest, de Sambre-et-Meuse, de Mayenne et d’Italie. Gouverneur de Tilsitt en 1807, général de brigade en 1808, il fut fait baron puis pair de France par Louis Philippe. Son nom est gravé sous l’Arc de triomphe de l’Étoile.
Le général Pierre BILLOTTE (1906-1992), qui durant la campagne de France parvint à ralentir l’avance des chars de Guderian dans les Ardennes. Représentant de la France libre à Moscou, puis secrétaire du comité de défense nationale à Londres, il débarqua en Normandie à la tête de la brigade blindée de la division Leclerc et participa à la libération de Paris, faisant prisonnier von Choltitz. Il fut fait Compagnon de la Libération. Elu député RPF de la Côte-d’Or en 1951, il fut ministre de la Défense nationale entre 1955 et 1956. Pierre Billotte fut l’un des gaullistes de gauche qui participèrent à la fondation de l’Union démocratique du travail (UDT). Nommé haut-commissaire en Algérie, il fut finalement remplacé par Christian Fouchet en 1962. Député du Val-de-Marne de 1962 à 1978, il fut encore ministre d’État chargé des départements et territoires d’outre-mer entre 1966 et 1968. Il fonde un « Mouvement pour le socialisme par la participation » en 1971. Il fut maire de Créteil de 1965 à 1977.
Jean-Antoine BORD (1814-1888) : facteur de pianos français originaire de Toulouse, il s’installa à Paris en 1843 et produisit 1 200 modèles de pianos originaux. Il se spécialisa dans les petits instruments rafinés, et fut renommé pour le soin et la décoration de ses instruments. En 1882, il inventa le sillet sans agrafes.
Le peintre Eugène CHARVOT (1847), qui étudia d’abord la médecine et devint médecin dans l’Armée Française. Stationné à Paris entre 1871 et 1873, il en profita pour étudier la peinture auprès de Félix Henri Giacomotti et Léon Bonnat. Il exposa des paysages et des scènes tunisiennes aux salons parisiens. Il est surtout connu comme graveur.
Tony d’ARPA (1941-2002), qui fut l’un des membres fondateurs et le guitariste rythmique des Chaussettes Noires, dont Eddy Mitchell était le chanteur. Sa carrière médiatique prit fin avec la fin du groupe.
Camille DARTOIS (1838-1917) : avec le photographe Nadar et Jules Duruof, il fonda lors du siège de Paris par les Prussiens la « Compagnie d’Aérostiers » dont le but était la construction de ballons militaires pour les mettre à la disposition du gouvernement. Ils établirent un campement sur la place Saint-Pierre, au pied de la butte Montmartre, où naquit la poste aérienne du siège. Les ballons permettaient de surveiller l’ennemi, d’établir des relevés cartographiques et également d’acheminer du courrier. C’est à bord de l’un d’entre-eux que Léon Gambetta, ministre de l’Intérieur, quitta Paris le 7 octobre 1870 pour regagner Tours afin d’y organiser la résistance à l’ennemi. Au total, 66 ballons furent construits, qui transportèrent 11 tonnes de courrier. Cinq des ballons seront capturés par l’ennemi. Cette première fabrication en série d’aéronefs, marqua officiellement la naissance de l’industrie aéronautique. Deux « usines » avaient été installés dans les gares de chemin de fer réquisitionnées : les frères Godard à la gare (Une gare est d’ordinaire un lieu d’arrêt des trains. Une gare comprend diverses installations qui ont une double...) de Lyon et Dartois et Yon à la gare du Nord.
Raoul DIAGNE (1910-2002) : footballeur d’origine sénégalaise, fils de l’ancien ministre des colonies Blaise Diagne, il fut sélectionné 18 fois en équipe de France et fut le premier joueur noir a connaître les honneurs de la sélection dès 1931. Il joua en équipe de France jusqu’en 1940 et participa à quatre coupe de France. Sa carrière de joueur achevée, il devint entraîneur de clubs en AOF, en Belgique et en Algérie, avant de prendre en mains l’équipe nationale du Sénégal au début des années 1960. Crématisé, il repose avec son épouse dans une case discrète du columbarium.
Gabriel GOBIN (1903-1998) : comédien belge, il débuta sa carrière dans les théâtres de province et de Belgique puis monta à Paris en 1935. Il intègra alors la troupe de Georges Pitoëff et participa à la création de nombreuses pièces de Jean Anouilh, Marcel Achard, Steve Passeur, Noël Coward, etc. Il débuta au cinéma en 1947, et devint un second ou troisième rôle dans plus de cent films. A partir de 1956, il participa à de nombreux feuilletons télévisés (Les cinq dernières minutes, L’homme du Picardie...).
Louis GUILLAUME (1907-1971) : enseignant, écrivain et poète français, il tint également pendant quasiment quarante ans un Journal. Sa sépulture, sur laquelle est déposée une pierre gravée de l’un de ses poèmes, est ornée d’un médaillon en bronze de Jean Baudet.
L’architecte et décorateur Jacques MOTTHEAU (1899-1981), qui fut professeur à l’École des Beaux Arts de Rennes. Membre du Comité supérieur de l’Enseignement des arts décoratifs, Jacques Mottheau reçut des commandes de l’État, notamment pour l’Élysée, et fut Président de la Société des Artistes Décorateurs. Concepteur de mobiliers, il s’est particulièrement intéressé à l’art breton. Dans son tombeau repose également Eugène VOISIN (1834-1914), qui fut maire de Joinville-le-Pont.
Le peintre Paul PARFONRY (1857-1920), qui représenta souvent des personnages dans des décors intérieurs urbains du XVIIIème siècle. Il repose sous le beau et imposant mausolée de famille.
Léon Roger WEIL (1896-2006) n’est pas une personnalité connue, mais il représenta pendant un temps un symbole : décédé à l’âge de 109 ans, il était le septième dernier poilu français. Durant la Première Guerre modiale, il avait été incorporé au 5e Bataillon de Chasseurs Alpins en Alsace, et avait participé en 1917 à la bataille du Chemin des Dames. Il fut résistant durant la Seconde Guerre mondiale. Il rejoignit dans le caveau son épouse, décédée... 44 ans auparavant !!
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