Les Fessard et les Lebègue : une dynastie de sculpteurs

mercredi 6 novembre 2013
par  Philippe Landru

Leur nom n’est pas connu du grand public, et pas beaucoup plus des taphophiles. Pourtant, un grand nombre de membres de cette famille a oeuvré à l’embellissement des cimetières. Allons plus loin : les membres de cette famille furent à l’origine de certaines des sculptures les plus connues des cimetières. Les rappeler au souvenir était la moindre des choses, à nous qui arpentons inlassablement les lieux.

Les imbroglios généalogiques sont tels que lorsqu’on s’intéresse à eux, on est vite dépassé par la complexité des signatures. Bref : j’ai décidé de rédiger cet article pour y voir plus clair, et réattribué à chacun sa place.

Nous présenterons d’abord les différents membres de la famille, leurs tombeaux, puis nous nous attacherons aux oeuvres de chacun.

Pour les Fessard

- Le sculpteur Noël Etienne FESSARD (1765-1839) et son épouse.
Ce couple eut au moins trois enfants :
- Pierre-Alphonse FESSARD (1798-1844), également sculpteur, qui laissa un très grand nombre de réalisations au Père Lachaise.
- Adèle Victoire Désirée (1802-1881), qui épousa Jean-Louis Augustin Lebègue.
- Louise-Elisa (1809-1865), qui épousa le frère du précédent, Benjamin Florentin Lebègue.

Pour les Lebègue

- Un épicier originaire de Vendeuil-Caply eut plusieurs enfants. Parmi eux, quatre devinrent sculpteurs :
- Jean-Louis Augustin LEBÈGUE (1797-1887), déjà cité, époux d’une fille Fessard.
- Jean-Baptiste LEBÈGUE (1800-1876),
- Benjamin-Florentin LEBÈGUE (1803-1878), époux de l’autre fille Fessard [1],
- Célestin Jules LEBÈGUE (on lit parfois, de manière impropre, Julien) (1815-1872)

A la génération suivante, on mentionnera encore celui qui fut le plus actif de la famille : Paul Adolphe LEBÈGUE (1833-1928). Il était le fils de Jean-Louis Augustin et de Adèle Fessard.

Lorsque l’on se plonge dans les générations plus récentes, on ne trouve plus d’artiste mais plusieurs unions généalogiques avec des marbriers funéraires (Bricongne, Serpette...), attestant de la pérennité de l’endogamie professionnelle.


Le tombeau du Père Lachaise (56ème division)


Il est le plus ancien, et donc celui qui permet de comprendre les liens unissant les deux familles. Dans ce tombeau reposent en particulier Noël Etienne Fessard et son fils Pierre-Alphonse, mais aussi Jean-Louis Augustin Lebègue et son fils Paul-Adolphe. Les quatre principaux artistes de la famille reposent donc dans le même tombeau.

Ce tombeau est orné, sur les deux faces, d’un médaillon en marbre :
- Le premier représente Noël-Etienne Fessard : il date de 1867 et fut réalisé par son gendre, Jean-Louis Augustin Lebègue, qui signe L. Lebègue [2]
- Le second est un autoportrait de Jean-Louis Augustin. Il est à noter que les deux médaillons datent de 1867.


Les tombeau du cimetière Montparnasse


- Jean-Baptiste LEBÈGUE (1800-1876), le second fils, repose dans la 29ème division du cimetière Montparnasse avec son épouse, Augustine Fleurine Devellenne, qui était également sa nièce [3].

Ils reposent sous un médaillon en marbre très ornementé réalisé par son neveu, Paul Lebègue. On notera une épitaphe qui ne brille pas par son humilité !

Bien qu’il ait été lui aussi sculpteur, on ne connaît aucune oeuvre de lui dans les cimetières.

- Le dernier frère, Célestin Jules LEBÈGUE (1815-1872) repose également à Montparnasse, mais dans une tombe de la 7ème division sans aucune ornementation. Avec lui repose sa descendance.


Les réalisations


L’oeuvre abondante de ces artistes est quasiment exclusivement localisée au Père Lachaise


Noël-Etienne Fessard


- Les bas-reliefs de la tombe Parmentier (39ème division). Le petit médaillon en bronze, anonyme, ne lui est pas attribué.

- La cippe décorée de la tombe Mourot-Bourdon (8ème division).

Les deux au Père Lachaise.


Pierre-Alphonse Fessard


Sa signature est assez classiquement : Fessard fecit, accompagné de la date. L’essentiel de ses réalisations est au Père Lachaise.

- Le profil en marbre de la tombe Diaz Carvalho (7ème division).

- Le buste -brisé- de la très discrète tombe Gublin (34ème division).

- Le beau médaillon en marbre du capitaine Serré (14ème division).

- Le bas-relief de la tombe Diaz-Santos (48ème division).

- Le buste en bronze et le bas-relief de la tombe Desmarets (20ème division).

- Le bas-relief de la chapelle Porcher de Lissonay (30ème division).

- Le bas-relief de la chapelle Sanegon-Vaufreland (10ème division).

- Les trois médaillons de la tombe Turpin (39ème division).

- Le buste du chirurgien Boyer, qui se trouve au cimetière Montparnasse (4ème division).

- J’ai également retrouvé l’une de ses oeuvres au cimetière ancien de Vincennes (94) : il s’agit de la tombe de Antoine François Bontemps, qui fut maire de Fontenay-sous-Bois sous le Premier Empire.

Parmi les oeuvres désormais disparues, on citera :
- le buste en platre bronzé de la tombe Fourier (18ème division) [4]
- Le bas-relief sur la tombe Sire de Cheminot (11ème division).


Jean-Louis Augustin Lebègue


- Le bas-relief de ma tombe Fabre est une bonne transition puisque le modèle fut réalisé par Pierre Adolphe Fessard, mais l’exécution confiée à Jean-Louis Augustin Lebègue (52ème division).

- Les deux médaillons de sa tombe (voir plus haut).

- Le bas-relief de la tombe Lhéritier de Chezelle (25ème division).

- Les deux statues, très abîmées, de la tombe Manvilles. Le reste de l’ornementation fut réalisé par lui et son fils Paul (6ème division).

Parmi les oeuvres désormais disparues, on citera :
- Les statues de la tombe Dord (19ème division).


Paul-Adolphe Lebègue


Il fut souvent un ornementiste, travaillant en collaboration, en particulier avec Adam-Salomon.

- La tombe de son frère Hippolyte, unique oeuvre à Montparnasse (voir plus haut).
- Les bas-reliefs de la tombe Scribe (35ème division).
- Les ornementations de la tombe Serres (pas le médaillon, qui est d’Adam-Salomon) (30ème division).
- Les ornements de la tombe de Marietta Alboni (66ème division).
- L’ensemble des ornements de la chapelle Poisson (dont les deux cariatides) (70ème division).
- La couronne de lauriers et rubans de la chapelle Rossini (4ème division).
- L’ensemble des ornements de la chapelle Cheronnet (71ème division).
- Les ornements (en particulier les fameuses chouettes) de la tombe du marquis de Casariera. A noter qu’à l’intérieur de la chapelle (non visible) se trouve une statue couchée du marquis réalisée par Célestin Lebègue.
- L’ange de la tombe Wasiliewitch de Satine (49ème division).
- Le médaillon en bronze de la tombe Desjardins-Lieux (62ème division).
- Le médaillon en marbre de la tombe Lenormant de Villeneuve (42ème division).
- Le médaillon en bronze de la tombe Corvi (92ème division).
- Le buste en bronze de la tombe Waser : daté de 1903, il est l’oeuvre la plus tardive de l’artiste dans ce cimetière.

- L’épée du comte Foucher de Saint-Faron (34ème division).
- Les ornements du cippe de la tombe Bernard-Mallet (26ème division).
- Les ornements de la tombe Roelofson (53ème division).
- Les ornements de la chapelle Palasmes de Champeaux (95ème division).
- Le tombeau Ségaud, en forme de rocher surmonté d’une croix (19ème division).

Parmi les œuvres désormais disparues, on citera :
- Le médaillon de la tombe Morand (26ème division).


[1Contrairement à ses trois frères, j’ignore où il repose.

[2Il signe toujours ainsi, ce qui permet d’identifier sa production.

[3Elle était la fille de Noël Devellenne et de Victoire Lebègue, sœur de son époux !

[4Le buste qui se trouve sur sa tombe n’est pas le sien !


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