ORANGE (84) : cimetière Saint-Clément
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C’est à la fin du XVIIIe siècle que l’ancien cimetière, initialement situé près de la cathédrale Notre-Dame, fut remplacé par ce nouveau cimetière, formé de trois espaces distincts : catholique, protestant et israélite.
- Cimetière israélite
A l’entrée du cimetière se trouvent les vestiges de l’enceinte romaine (10 avJC). A proximité se trouvent les restes d’une tour, longtemps identifiée comme des thermes, qui serait la fameuse "tour Gloriette" des troubadours décrite à Guillaume au Cornet, premier comte d’Orange, comme le palais de la reine Orable.
Constitué en terrasses, il prend par endroit des aspects de jardin méditerranéen antique. La topographie du lieu n’est pas évidente, d’autant qu’un grand nombre d’enclos familiaux brouillent l’ordonnancement général.
- Le monument aux morts
Les œuvres d’art ne sont pas très présentes, même si certains monuments sont travaillés (et utilisent parfois des ornements de réemploi).
- "Ici repose notre chère Julienne, victime du feu d’artifice du 26 août 1911"
Reposent dans cette enceinte :
Nicolas Nikolaïevitch de BEAUHARNAIS, duc de LEUCHTENBERG (1868- 1928) : arrière-petit-fils d’Eugène de Beauharnais, lui même fils de la célèbre Joséphine, mais également arrière-petit-fils du tsar Nicolas Ier de Russie. Bien qu’aîné des descendants d’Eugène de Beauharnais, il naquit plusieurs années avant le mariage officiel de ses parents et fut donc exclu de la succession impériale. Elevé en Russie, il fut malgré tout intégré à la haute société de Saint-Pétersbourg. Il il conserva par ailleurs de nombreuses œuvres d’art héritées des Beauharnais, parmi lesquelles un portrait de l’impératrice Joséphine par Gérard aujourd’hui conservé à l’Ermitage. Commandant de l’armée russe durant la Première Guerre mondiale, la révolution bolchévique contraint sa famille à l’exil. Il s’installa au château de Ruth, à Sainte-Cécile-les-Vignes, près d’Avignon. Très engagé dans le mouvement blanc, il se rapprocha des monarchistes de Kiev. L’ataman des Cosaques le nomma alors ambassadeur extraordinaire et ministre plénipotentiaire à Berlin afin qu’il persuade les autorités allemande de fournir du matériel militaire à la Grande armée du Don, sans succès. Sa fortune presque totalement évanouie, il consacra ses dernières années à cultiver la vigne et à produire du vin « Beauharnais ». En 1928, il perdit son plus jeune fils, Michel (1905-1928), dans un accident de voiture. Très affecté par cet événement, il s’éteignit peu de temps après. Il fut finalement enterré à Orange, au côté de son épouse et de son dernier fils.
Dans la partie protestante se trouve l’enclos familial des GASPARIN, branche cadette d’une famille noble corse, celle des Gaspari. Y reposent en particulier :
- Thomas-Augustin de GASPARIN (1754-1793) : capitaine au régiment de Picardie en 1789, lorsqu’éclate la Révolution, il en embrassa les principes avec enthousiasme. Député des Bouches-du-Rhône à l’Assemblée législative de 1791 à 1792, puis à la Convention de 1792 à 1793 ; il mit en accusation les Girondins et vota la mort du roi. Il fut membre du Comité de salut-public et fut envoyé en province pour mener les opérations militaires. C’est à cette occasion, au siège de Toulon, qu’il fit la connaissance du jeune Bonaparte qu’il appuya auprès du Comité. Malade, il ne vit pas la fin du siège de la ville qu’il contribua grandement à reprendre aux Anglais. À Sainte-Hélène, Napoléon légua une somme de cent mille francs à ses héritiers. Compte-tenu des vicissitudes de la Révolution, et du fait qu’il était proche de Robespierre, cette mort prématurée lui évita peut-être la guillotine ! Le projet de placer son cœur au Panthéon proposé par la Convention ne fut jamais mis à exécution. Placé aux archives, ce cœur à a priori disparu.
- Adrien de GASPARIN (1783-1862) : il embrassa, comme son père, la carrière des armes et fut attaché comme officier de cavalerie à l’état-major du maréchal Murat pendant la campagne de Pologne (1806). Une blessure reçue à Eylau le força à quitter le service. Il rentra dans sa famille et s’adonna à des études d’agronomie. Il rédigea de nombreux mémoires, en particulier en science vétérinaire, qui furent remarqués par l’Académie des Sciences. Après la Révolution de 1830, Gasparin, qui jusque-là s’était plutôt rangé dans l’opposition à la Restauration, se rallia à la monarchie de Juillet. Ami intime de François Guizot, comme lui protestant du Midi de la France, il fut élu député du Vaucluse en 1830 mais ne participa aux travaux parlementaires, car il devint successivement préfet de l’Isère (1830), de la Loire (1831), du Rhône (1833). Il était en poste à Lyon au moment de la révolte des Canuts d’avril 1834. Il déploya la troupe dans toute la ville et engagea une répression brutale, qui fut aussi l’occasion de frapper les républicains et de démanteler leurs réseaux. En récompense de son zèle, Gasparin fut fait pair de France. Sous-secrétaire d’État à l’Intérieur entre 1835 et 1836, Guizot le fit ensuite nommer ministre de l’Intérieur (1836-1837) (c’est lui qui à ce poste supprima la chaîne des forçats). Il fut à nouveau ministre de l’Intérieur et chargé de l’intérim du ministère des Travaux publics, de l’Agriculture et du Commerce en 1839 et fut admis à l’Académie des sciences en 1840. Après la Révolution de 1848, il se retira définitivement de la vie publique et reprit ses travaux agronomiques. Son fils Agénor (1810-1871), qui fut également agronome et député de Corse, ne repose pas dans ce cimetière familial mais au cimetière de Valeyres-sour-Rances, en Suisse.
- Augustin de GASPARIN (1787-1857) : frère du précédent, qui en sa qualité de capitaine de la garde nationale d’Orange reçut l’ordre, en 1815 de rejoindre avec sa compagnie les troupes royales, dans la Drôme, pour contrer le retour de Napoléon. Il fut député du Vaucluse de 1837 à 1842.
Le sculpteur Alphonse GUÉRIN (1844-1867), élève aux Beaux-Arts.
Le Compagnon de la Libération Georges GOUMIN (1905-1941). Aviateur, il commandait le tout premier groupe de sous-officiers aviateurs qui aient rallié l’Angleterre après l’appel du 18 Juin 1940. Il effectua de nombreuses missions en Afrique. C’est ainsi qu’il décolla du Caire pour ravitailler des troupes alliées au sol, en Crète. Abattu par la DCA allemande, mortellement blessé, il pu cependant poser son appareil en flammes, sauvant ainsi les trois autres membres de l’équipage. Il fut inhumé en Crète. En août 1946, son corps a été ramené en France pour être inhumé, après une cérémonie aux Invalides, dans sa ville natale d’Orange.
Jean-Jacques MEYNARD (1784-1848) : négociant à Avignon, il fut député de la majorité ministérielle du Vaucluse de 1831 à 1848. Sa tombe se trouve dans un enclos familial.
Jean PLANTEVIN (1913-1980) : agent de commerce en Afrique, il rejoignit les FFL et prit part au ralliement du Cameroun en août 1940. Sous les ordres de Leclerc, il se distingua pendant les opérations en Tunisie. En 1944, il débarqua à Cavalaire et combattit pour la libération de Toulon puis lors de la remontée de la Vallée du Rhône. Il termina la guerre dans les Alpes. Il fut fait Compagnon de la Libération.
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