BROGLIE (27) : cimetière
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Le petit cimetière de Broglie ne se distinguerait pas des autres cimetières ruraux de la région s’il n’hébergeait, à l’intérieur de son enceinte, le cimetière privé de la famille de Broglie, qui donna son nom à la commune (dont le nom d’origine était Chambrais).
Famille noble française d’origine piémontaise, les Broglie [on prononce breuil [1] ] avaient acheté en 1716 cette baronnie érigée en duché héréditaire en 1742 par Louis XV, sous le nom de Broglie pour récompenser la famille de Broglie des éminents services rendus au royaume, notamment lors des guerres de succession d’Espagne, de Pologne et d’Autriche.
Etonnante famille : elle fournit à la France plusieurs maréchaux, cinq académiciens, un Nobel de physique et deux présidents du Conseil !
Le petit cimetière privé, séparé du cimetière de Broglie par un petit muret, est un alignement sur quatre rangées d’une vingtaine de tombes, toutes semblables, aux écritures difficilement lisibles.
Reposent donc ici, parmi d’autres membres de la famille :
Victor de BROGLIE, 3e duc de Broglie (1785-1870) : héritier du duché de Broglie à la mort de son père, guillotiné en 1794 (inhumé au cimetière de Picpus), Pair de France en 1814, il entra dans une opposition active avec l’élection de la « Chambre introuvable », dominée par les ultras, en 1817. Partisan de la révolution de 1830, il occupa plusieurs ministères sous Louis-Philippe avant de prendre la présidence du Conseil en 1835. Député de l’Eure après 1848, il apporta son soutien à Guizot.
Albertine, baronne STAËL von HOLSTEIN (1797-1838), son épouse, qui était la fille de Mme de Staël.
leur fils, Albert de BROGLIE, 4e duc de Broglie (1821-1901) : historien, et diplomate monarchiste et orléaniste, il fut secrétaire d’ambassade à Madrid et à Rome sous le règne de Louis-Philippe Ier, puis quitta son poste en 1848 et s’abstint de toute activité politique sous le Second Empire. Député de l’Eure en 1871, il fut nommé ambassadeur à Londres. Il fut aussi l’une des figures du catholicisme libéral. Chef du gouvernement de l’« ordre moral » en 1873-1874, puis en 1877, il s’efforça vainement de préserver les droits dynastiques des Orléans. Sénateur de l’Eure de 1876 à 1885, il fut élu membre de l’Académie française et de l’Académie des sciences morales et politiques.
son épouse, Pauline de GALARD de BRASSAC de BÉARN (1825-1860), petite-fille du général d’empire Jean Le Marois, qui fut portraiturée par Ingres.
Paul de BROGLIE (1834-1895), frère d’Albert : prêtre et professeur d’apologétique à l’Institut Catholique de Paris, il enseigna aussi l’histoire des religions et s’employa à élaborer un enseignement et des publications destinées à équilibrer les cours donnés au Collège de France (fidèle au dogme, il contesta les conclusions de Renan). Il fut abattu d’un coup de pistolet par l’une paroissienne paranoïaque persuadée qu’il avait trahi le secret de la confession.
Victor de BROGLIE, 5e duc de Broglie (1846-1906), fils d’Albert : député de la Mayenne de 1893 à sa mort, sa carrière paraît assez effacée en comparaison de celles de ses ascendants et descendants.
Maurice de BROGLIE, 6e duc de Broglie (1875-1960), fils du précédent : physicien français, il fut élu membre de l’Académie des sciences en 1924, puis de l’Académie française en 1934. Ses travaux sur les spectres de rayons X lui valurent plusieurs prix. De 1942 à 1945, il fut titulaire de la chaire de physique générale et expérimentale au Collège de France. On lui doit l’invention d’un appareil permettant aux sous-marins de recevoir les signaux de la T.S.F.
Jean de BROGLIE (1921-1976), arrière-petit-fils d’Albert par une branche latérale [2] : Maître des requêtes au Conseil d’État, député de l’Eure depuis 1958, constamment réélu jusqu’à sa mort, il appartint aux Républicains indépendants, fut maire de Rugles puis de Broglie. Il fut successivement Secrétaire d’État chargé de la Fonction publique en 1962, puis aux Affaires algériennes (1962-1966) et aux Affaires étrangères (1966-1967). Avec Louis Joxe et Robert Buron, il fut l’un des négociateurs des Accords d’Évian conclus entre la France et le FLN, le 18 mars 1962, qui mirent un terme à la guerre d’Algérie. Son assassinat, en décembre 1976, sur fond de scandale financier, fut l’une des grandes affaires de la Ve République.
On notera l’absence dans ce cimetière de Louis de BROGLIE, 7e duc de Broglie (1892-1987), académicien et prix Nobel de physique en 1929, qui repose au cimetière ancien de Neuilly-sur-Seine, dans le caveau familial de son épouse.
[1] Coluche disait du nom de famille de Broglie que c’était un nom de faux-jeton car il ne s’écrit pas comme il se prononce
[2] son père Amédée (1891-1957) et son grand-père François (1851-1939) reposent dans le caveau familial de la 60ème division du Père Lachaise
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