LIZY-SUR-OURCQ (77) : cimetière
par
Cet article complète un autre, plus général, sur les personnalités du cirque : On enterre aussi les clowns : histoire du cirque vue par les cimetières
Cimetière étonnant que celui de Lizy-sur-Ourcq ! Dès l’entrée, son aspect insolite saute aux yeux : sur un site assez quelconque se dressent des chapelles d’une taille démesurée pour un petit cimetière rural. Une petite plaquette intéressante réalisée par le syndicat d’initiative retrace les grandes lignes de l’histoire du lieu.
C’est en 1843 qu’il ouvrit ses portes, sur un terrain donné par une famille notable de la commune. Son histoire étonnante commence en 1897 lorsque Marie-Louise Baglioni, mourante, décida d’être enterrée là où s’était arrêté le groupe de roulottes tziganes dont elle était membre. Son père vint l’y rejoindre en 1913 : il s’agissait du forain Jean-Baptiste Bouglione. Ainsi le cimetière de Lizy devint-il la nécropole de la célèbre famille de cirque. D’autres familles circassiennes y acquirent également des concessions : en 1904, Firmin Falck fut enterré un peu plus bas, revêtu de son costume de clown.
Aujourd’hui, plus de 25 familles de cirque (Capello, Van Been, Falck, Zavatta…) y reposent, faisant de la petite nécropole un petit Panthéon du cirque. Les sépultures, de taille généralement imposantes, témoignent de la religiosité gitane dans ce qu’elle a d’intime et de démesurée à la fois, alternant témoignages affectueux aux morts et objets kitschs. Elles sont le plus souvent illustrées par des portraits.
Parmi les tombes, on remarquera celle de Rodophe ZAVATTA (1906-1998), le frère d’Achille, voltigeur devenu clown après un accident au trapèze volant.
La tombe de Marie-Louise Baglioni (épouse d’Etienne Lambert) est toujours là, même s’il ne s’agit plus du monument d’origine.
La saga Bouglione
La Famille d’origine gitane Bouglione est composée de montreurs d’ours au XVIIIe siècle en Italie. C’est Sampion (1875-1941) qui développe progressivement l’affaire jusqu’à en faire, au début de ce siècle, une des principales ménageries itinérantes de France. Les quatre fils de celui-ci, Alexandre (1900-1954), Joseph (1904-1987), Firmin (1905-1980) et Sampion II (1910-1967) reçoivent leur formation dans la ménagerie paternelle. En 1924, il transforment leur zoo ambulant en cirque et se spécialisent : Sampion comme dresseur de chevaux, Firmin comme dresseur de fauves, Joseph comme dresseur d’éléphant et Alexandre comme administrateur de cirque.
La ménagerie se mue en cirque sous l’appellation Cirque des quatre frères Bouglione. Le modeste chapiteau des débuts s’agrandit suite à un magistral coup de bluff ; Ayant trouvé au fond d’une imprimerie tout un stock d’affiches du show européen de Buffalo Bill, Sampion qui manque d’affiches en fait l’acquisition et a l’inspiration de placer son spectacle sous l’égide du cow-boy américain : La Stade Circus Ménagerie Buffalo Bill. En 1928, à Paris, le Wild West Show est un succès. On a déguisé un vieux gitan en Buffalo Bill ... et le public oublie que ce dernier est bel et bien mort en 1917. Le Cirque part à la conquête de Paris où en octobre 1934, à l’exploitation du chapiteau, les Bouglione, sous l’impulsion de son nouveau directeur Joseph Bouglione, ajoutent celle du Cirque d’Hiver.
Joseph a quatre fils, ce sont les Bouglione Juniors : Firmin II, Emilien, Sampion III et Joseph II. A ces quatre garçons viennent s’ajouter trois filles, Odette, Josette et Sandrine (qui épousa un Gruss), formant ainsi la cinquième génération. En 1962, l’ancien cirque Médrano rouvre ses portes sous l’appellation de Bouglione Juniors puis de Cirque de Montmartre. Il fut finalement démoli en 1973. Le chapiteau continue sa tournée en France et en Belgique. Sampion meurt en 1987. La dynastie continue, et le cirque avec elle. En 2018 décède à l’âge de 107 ans la matriarche de la famille, Rosa (1910-2018), veuve de Joseph.
Il existe de nombreuses tombes de famille dans le cimetière, mais la chapelle « patriarcale » est l’une des plus grandes. Elle est désormais ornée de deux lions en bronze. L’intérieur est richement décoré d’une mosaïque religieuse.
Les deux lions qui gardaient le caveau ont été volés dans la nuit du 15 au 16 octobre 2021.
Reposent également dans ce cimetière
Louis Désiré BENOIST (1821-1896) : maire de la commune, sénateur de Seine et Marne 1891-1896, il fit œuvre d’historien du Pays d’Ourcq. En 1870, il refusa de livrer à l’ennemi la liste des conscrits du canton de Lizy-sur-Ourcq. Pour cette raison, il fut maltraité par les allemands puis emprisonné à Meaux et menacé de mort, mais l’armistice le délivra.
François CHEVREMONT (1824-1907), bibliographe de Marat.
Les parents de Geneviève de Fontenay, du comité Miss France (tombe Mulmann).
Commentaires