Il y a quelques mois en dénichant dans une brocante le « petit format » (partition ancienne illustrée) d’une chanson de Francis Dufor, j’ai appris à la fois l’existence de ce célèbre artiste de la fin du XIXe siècle et de la Belle Epoque (chanteur réaliste, créateur du genre) et sa tragique disparition lors cette terrible tragédie maritime survenue en février 1910, qui boulevera la France et le monde entier. Je vous invite à lire l’article (lien tout en bas) qui relate le drame...
Mais pour commencer cet extrait des « Mémoires de Mayol - Souvenirs racontés à Charles Cluny, 1929 » :
« — Pardon, Félix, tu oublies en 1910 un événement tragique et important dans ta vie ; permets‐moi de le rappeler : C’est à cette époque que se produisit, dans la nuit du 9 au 10 février, le dramatique naufrage du transatlantique Général Chanzy, faisant le service entre Marseille et Alger. Toute la t
roupe d’artistes qui devait figurer deux jours plus tard au programme du Casino d’Alger fut engloutie dans les flots de la Méditerranée.
— Hélas ! oui c’est là que périt mon pauvre ami Francis Dufor, si courageux, si travailleur, et si plein de talent...
— Justement, et tu recueillis aussitôt sa veuve, à qui tu assuras une situation en lui donnant la direction de l’Édition Mayol que tu venais de fonder...
— On ne pouvait pas la laisser dans la misère ; avec le chagrin qu’elle avait, elle serait morte avant
l’heure... Sur mes instances, Dufrenne la garda comme caissière quand il me racheta le Concert Mayol.
Il y avait aussi sur le Chanzy cet infortuné Janniot, qui s’int itulait si justement « le Tabarin moderne »... Pauvre Janniot, il n’était que gaîté et fantaisie... Regarde s’il n’y a pas, par moments,
à croire à une certaine fatalité dans nos destinées. Janniot, dès l’apparition du cinématographe, s’était donné à l’art muet, et il commençait à s’y faire une belle place, chez Pathé.
Mais les planches lui manquaient : « Tabarin, disait‐il ça demande un tréteau ! » Et, décidé à reprendre quelques engagements, il venait enfin d’obtenir ce contrat pour Alger, le premier après quatre ans d’absence de la scène ! Et il était si heureux de refaire son numéro... Infortuné Janniot !...
— Tu ne parles pas de Marcelle Lafarre ?
— Pauvre chère amie ; je l’avais vue la veille de son départ. Nous avions déjeuné ensemble avec son mari :
Sauveur, qui fut mon accompagnateur, et sa petite fille, Sylvie, un bébé à peine, qui avait amené une joie folle dans ce ménage si parfaitement uni.
— Oui, mais puisque tu ne veux pas le dire, laisse‐moi rappeler que ce bébé, tu as demandé aussi à assurer son sort ; tu l’as recueilli, fait élever et éduquer, si bien qu’aujourd’hui la fille de Marcelle Lafarre est une grande et belle demoiselle de vingt ans, pourvue, grâce à toi, d’une instruction et d’une éducation parfaites, et d’une situation promise au plus brillant avenir... N’est‐‐elle pas, maintenant, comptable dans une des plus grandes banques de Marseille ?...
— En effet, mais pourquoi mettre cela dans mes mémoires ?
— Pour le mettre en même temps dans la mémoire des autres !... »
En réponse à...