SAINT-CRÉPIN-DE-RICHEMONT (24) : crypte du château
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Sur les hauteurs de la commune de Saint-Crépin-de-Richemont se trouve le château de Richemont, construit entre 1564 et 1610. C’est un édifice très intéressant dans la mesure où son architecture est à cheval entre le Moyen-Age et la Renaissance. Il se présente sous la forme de deux bâtiments formant équerre : l’influence italienne est sensible, tant par la présence de fenêtres à meneaux que par le perron à double révolution, qui mène à la grande pièce de l’aile de réception. La tour massive donne un aspect médiéval à l’ensemble, même si elle ne fut conçue que dans un but décoratif.
Le seigneur du lieu qui fit édifier la demeure était Pierre de BOURDEILLE (ca1540-1614), plus connu sous son nom de plume de BRANTOME. Ses descendants vivent encore dans le lieu qu’ils font visiter : les aînés semblent confier cette mission aux jeunes. Il y a une sorte de naïveté charmante dans leur présentation de la batisse ancestrale qui rend la visite très vivante : il n’est pas commun de voir les petits groupes de touristes avancer, les patins aux pieds, pour ne pas abimer de vrais parquets du XVIe siècle ! Les pièces sont encore grandement dans leur « jus ». On sent bien que si Brantome revenait, il ne serait pas dépaysé par sa demeure.
Ce gentilhomme fit partie des familiers de la cour des derniers Valois : abbé séculier de Brantôme, il s’illustra aussi bien par les armes que par la plume. Catholique attaché aux Guise et à la couronne, il raccompagna Marie Stuart en Ecosse après le décès de François II. Il participa aux Guerres de religions, voyagea beaucoup (Malte, Espagne...). La mort de François d’Alençon, héritier du trône auquel il était particulièrement lié, ruina ses ambitions : il allait trahir Henri III au profit de l’Espagne quand il fit une mauvaise chute qui l’immobilisa dans ses propriétés. Dès lors, il se consacra à l’édification de son château et à la rédaction de ses oeuvres : il fut l’auteur de chroniques, de récits de voyages, de récits de guerre ou encore de biographies. Il se plut surtout, dans une tournure galante, à décrire son amour des femmes (Les vies des dames galantes), se faisant ainsi l’historiographe des dames de la Renaissance. Il fut l’un des derniers modèles du chevalier preux et courtois.
Il repose dans la chapelle familiale du château, où les membres de la famille sont encore inhumés.
Voici la retranscription (en français modernisé) de l’éloge funèbre qui est gravée sur sa plaque funéraire :
"Passant, si tu es curieux de savoir qui gît en cette chapelle, c’est le corps de Messire Pierre de Bourdeilles en son vivant chevalier gentilhomme ordinaire de la chambre des Rois Charles IX & Henri III, chambellan de Monsieur le duc d’Alençon leur frère et pensionnaire des dits rois de la somme de cent mille livres par an, Seigneur et baron de Richemont, de St Crépin, la chapelle Montmoreau & coseigneur usufructaire (usufruitierà de Brantome, issu du coté paternel de la très noble et antique race de Bourdeilles renommée dès le temps de Charlemagne, comme les histoires anciennes et vieux romans, tant français, italiens qu’espagnols & titres vieux et antiques monuments de la maison le témoignent de père en fils jusqu’à aujourd’hui et du coté maternel de cette grande et illustre race de Vivonne et de Bretagne. Il fit son premier apprentissage aux armes sous ce grand capitaine Monsieur François de Lorraine duc de Guise et eut sous sa charge deux compagnies de gens de pieds, & ne dégénéra en rien de la vertu de ses ancêtres, mais se trouva en plusieurs guerres et combats hasardeux, tant en France qu’en pays étrangers : même le roi de Portugal Dom Sebastien honorant sa valeur au retour de la conquête de la ville de Belys et son Pignon en Barbarie le fit chevalier de son ordre appelé l’habito de Christo et nonobstant toutes ces grandeurs il n’a jamais eu de repos et contentement en ce monde, aussi une âme généreuse n’en pouvait avoir que denas le ciel.
Il décéda le cinquième juillet de l’an mil six cent quatorze. Priez Dieu pour lui".
Sa plaque funéraire porte les armes de la famille de Bourdeilles et celles de la Bretagne, en référence à sa famille maternelle, les Vivonne, comme il est signifié sur son épitaphe.
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