BAILLEUL (59) : cimetière
par
Autrefois situé près de l’église Saint-Vaast, le cimetière de Bailleul est implanté sur son site actuel depuis la fin du XVIIIe siècle. Son entrée principale est cantonnée de deux édifices. Du côté droit se trouve une petite chapelle dédiée à Notre Dame de Hal. Inaugurée en 1930 et érigée d’après les plans de l’architecte Louis Roussel. Du côté gauche de l’entrée se trouve la maison du gardien, édifiée en 1923.
Le cimetière s’organise autour d’une allée centrale plantée de tilleuls et bordée de buis.
Ce cimetière est habilement entretenu et médiatisé par Kerk Hof, une association qui « a pour but la sauvegarde du patrimoine architectural au sein de notre cimetière communal, pour la mémoire individuelle et collective, pour la transmission d’une histoire de la ville avant sa destruction en 1918, pour la reconnaissance du savoir de nos marbriers et sculpteurs ». J’ai régulièrement médiatisé leurs actions. Pour en savoir plus, il suffira de consulter leur très beau site.
Curiosités
Ce cimetière possède une particularité rare : la présence initiale, organisée en mandorle autour du calvaire, de quatorze chapelles, représentant les quatorze stations du chemin de Croix. Aujourd’hui nombre d’entre elles sont à l’abandon, en état de ruines voire disparues.
- Le tertre central des ecclésiastiques.
Le cimetière abrite la sépulture de la famille paternelle de l’académicienne Marguerite Yourcenar ainsi que celle d’une grand-mère de l’acteur Gérard Jugnot.
En terme artistique, le cimetière se signale par sa sobriété : une statuaire assez rare, et toujours d’inspiration religieuse. La chapelle en briques domine, sans ornement.
- Bas-relief sur la tombe Lotthé, œuvre de Camille Debert.
Le cimetière de Bailleul centre jouxte le cimetière militaire de la Première Guerre mondiale Bailleul Communal Cemetery And Extension, entretenu par la Commonwealth War Graves Commission. On y trouve 5014 tombes de soldats britanniques, canadiens, australiens, néo-zélandais, sud-africains et indiens. Nombre de pierres tombales sont collées les unes aux autres, indiquant que les soldats ont été enterrés dans des fosses communes, tant les combats furent meurtriers. Le nombre élevé de tombes s’explique par le fait que Bailleul était un centre hospitalier britannique, ainsi qu’un poste de dégagement des blessés et morts canadiens et le premier poste de secours australiens, et que la ville fut sévèrement bombardée en juillet 1917. On peut également y trouver une rangée de 30 tombes de travailleurs chinois du « Labor Corps » ainsi que 154 tombes de soldats allemands des deux guerres.
Célébrités : les incontournables...
... mais aussi
Louis BEHAGHEL (1792-1868) : maire de Bailleul, il fut député du Nord de 1842 à 1846, siégeant sur les bancs de la droite légitimiste.
Le général Henri CHEROUTRE (1847-1913) qui servit au Tonkin et en Algérie avant de devenir gouverneur de la Corse où il pacifia l’île. Sa tombe est ornée d’un médaillon en bronze par Camille Debert.
L’échevin Jacques Ferdinand de CORTYL (1754-1813), seigneur de Wytshove, qui fut avocat au parlement de Flandres.
Honoré DECLERCK (1765-1843) : maire de la commune sous la Révolution, il fut député du Nord au Conseil des Cinq-Cents le 24 germinal an VI. Opposé au coup d’État du 18 Brumaire, il fut un temps interné à Rochefort-sur-Mer. La pleureuse en bronze qui orne la tombe fut réalisée par le sculpteur allemand Fidel Binz.
Léona DELCOURT (1902-1941) : artiste et danseuse, elle noua une brève relation en 1926 avec André Breton qui fit de leur rencontre le sujet de son récit autobiographique Najda. En début d’année 1927, elle fut internée pour troubles psychologiques et après plusieurs asiles, se retrouva transférée à l’asile de Bailleul. Elle y mourut en pleine Seconde Guerre mondiale, ayant probablement succombé à une épidémie de typhus aggravée par une sous-alimentation chronique, due, comme pour les autres malades mentaux, à la politique d’extermination par la faim menée sournoisement par le gouvernement de Vichy en conformité avec l’idéologie nazie.
Jean DELOBEL (1933-2013) : maire de Bailleul de 1977 à 2006, il fut député du Nord de 1997 à 2007.
Le graveur et pastelliste Jules Alphonse DETURCK (1862-1941) qui fut l’élève d’Alexandre Cabanel et est aussi de Léon Bonnat et de Gustave Jacquet. Ce dernier, voyant la pureté des traits des dessins, lui conseilla de s’orienter vers la gravure. Il fut alors admis dans la classe de Louis-Pierre Henriquel-Dupont. En 1888, il obtint le deuxième second grand prix de Rome pour la gravure en taille-douce. En 1924, il fut nommé membre du jury pour le concours du prix de Rome auprès de l’Académie des beaux-arts. Dans la même sépulture de famille repose son frère, le peintre Henry DETURCK (1859-1898) .
Natalis DUMEZ (1890-1976), maire de la commune en 1919, il s’engagea dans la Résistance en 1940 et organisa une chaîne d’évasion pour les soldats alliés. Il collabora à la création du journal clandestin La Voix du Nord en avril 1941.
Le compositeur et organiste Julien KOSZUL (1844-1927), qui fut l’élève de Camille Saint-Saëns et qui eut pour condisciples et amis Gabriel Fauré et Eugène Gigout. En 1889, il s’installa à Roubaix où il prit la direction du Conservatoire national de musique. Là-bas, il encouragea le jeune Albert Roussel à entreprendre une carrière artistique. Un de ses fils est l’angliciste André Koszul. Il eut pour petit-fils le compositeur Henri Dutilleux et le mathématicien Jean-Louis Koszul.
Le chanoine Ernest LOTTHÉ (1886-1962), qui fut protonotaire Apostolique et secrétaire particulier du Cardinal Liénart. Il laissa un témoignage de ce cimetière : « Aucun cimetière, sans excepter ceux d’Italie, ne m’a paru aussi beau que celui de Bailleul. Nos pères avaient un art de disposer les choses naturellement et de créer une poésie en des lieux qui ne sembleraient voués qu’à la tristesse et aux pleurs. Dès la grille franchie, le haut calvaire encadré de peupliers apparaît au bout d’une allée de tilleuls taillés en espaliers. Aux pieds du Christ, sur une levée de terre, trois pierres sont légèrement inclinées, dont les noms se devinent à peine sous la patine verdâtre. Là, reposent les anciens pasteurs des deux paroisses au milieu de leurs ouailles. Cette allée centrale est la seule qui soit rectiligne, les autres, étroites et sinueuses, bordées de buis, se croisent comme dans les jardins privés ».
Ignace PLICHON (1814-1888) : député du Nord à de nombreuses reprises (1846-1848, 1857-1870, 1871-1885), il fut un très éphémère ministre des Travaux publics en 1870. Partisan déterminé du protectionnisme, il siégea dans les rangs de la droite conservatrice dont il devient le leader nordiste incontesté. Catholique farouche, il défendit avec vigueur les intérêts cléricaux en soutenant le programme de l’ordre moral. Il repose sous un sarcophage de granit gris, érigé au sein de l’enclos funéraire familial.
L’ingénieur Jean PLICHON (1863-1936), fils du précédent, qui présida le conseil d’administration de la Compagnie des mines de Béthune et administra également plusieurs autres firmes minières, sidérurgiques et bancaires. Malgré son âge (51 ans), il prit part à la guerre. Il fut député du Nord, de 1889 à 1936, avec un bref intermède au Sénat (1920-24). En tant que parlementaire, il intervient souvent, notamment au Sénat, en faveur des départements dévastés. Il repose à quelques mètres de l’enclos familial Plichon, dans une chapelle en briques où est également indiquée l’identité de son père (qui n’y repose pas, comme nous l’avons vu).
Joseph Van MERRIS-HYNDERICK (1761-1833) : maire de Bailleul de 1830 à 1830, il fut député du Nord de 1815 à 1816 (siégeant dans la majorité de la chambre introuvable) et de 1822 à 1827.
Le magistrat Benoît Amand de PUYDT (1782-1859) qui accumula tout le long de sa vie, une importante collection d’objets précieux. A sa mort en 1859, il décida de léguer à sa ville, sa collection d’objets d’arts ainsi que sa maison, afin d’en faire un musée.
Le peintre Édouard SWYNGHEDAUW (1836-1927).
L’officier René VALANDE (1886-1943), qui fut également grand-reporter et qui laissa de son expérience de nombreux écrits.
Le peintre Pharaon de WINTER (1849-1924), installé à Paris en 1872, entra à l’École des beaux-arts de Paris dans l’atelier d’Alexandre Cabanel et fréquenta Jean-Baptiste Carpeaux et Pierre Puvis de Chavannes. L’artiste se distingua dans les Salons, aux côtés de ses amis les peintres Jules Breton et Jules Bastien Lepage. Il peignit sur de nombreux thèmes en accordant une grande place au dessin dans ses tableaux : portraits, paysages, scènes d’intérieur, scènes religieuses… Avant tout attaché à sa Flandre natale, Pharaon de Winter fut un portraitiste s’inscrivant dans le réalisme de la tradition flamande.
Toutes les photos sont les miennes, exceptées :
Behaghel, Delcourt, Dumez, Lotthé Ernest, Van Merrys, Swynghedauw et Valande : Geneanet ou Wikipedia.
Commentaires