EMAER Fabrice (1935-1983)
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Peu connu du grand public, il fut pourtant une figure centrale de la vie artistique des années 70 et 80.
Entrepreneur, il ouvrit son premier club, « Le Pimm’s Bar », en 1964, qui devient très vite un rendez-vous pour les homosexuels. En 1968 au 7, rue Saint-Anne -alors quartier gay de la capitale- ,il ouvrit Le Sept. La grande innovation d’Emaer : mélanger les communautés, gay et hétéro, riches et moins riches... Selon la devise : "Il n’était pas nécessaire d’être riche ou célèbre, mais il fallait être beau".
Selon ce principe, et s’inspirant de la mythique boite new-yorkaise Studio 54, il réouvrit en 1978 Le Palace. Durant quelques années (de 1978 à 1983), le lieu cristallisa la quintessence de la branchitude, mais fut également le lieu où se révélèrent les courants artistiques et esthétiques de l’époque : disco pop, punks et aristocraties mêlées, sens de la fête, de l’événement... Le lieu fit émerger plus d’une figure de la nuit : de Paquita Paquin à Edwige, de Pacadis à Jenny Bel Air, de Farida à Krootchey... Les physios avaient pour mission de choisir qui pouvait pénétrer : un mélange de riches et de pauvres, gays ou hétéros, noirs ou blancs, bourgeois ou punks. Ce qu’elles devaient déterminer, c’est une attitude, un look…Tous s’y croisaient, de Warhol à Le Luron, de Mourousi à Roland Barthes (un habitué), mais aussi Grace Jones, Dali, Gainsbourg, Jagger, Amanda Lear, Kenzo, Lio, Madonna à ses débuts... Des esthétiques s’y créèrent ou inspirèrent : Pierre et Gilles, Castelbajac, Mugler et Gaultier, Yves St Laurent, Jean-Paul Goudde, Philippe Starck, Christian Louboutin, Andrée Putman, Lagerfeld, Ardisson... Ce fut une explosion de tendances. Les couleurs, les sons, les goûts acidulés des années 80, de celles dont même les ados d’aujourd’hui sont nostalgiques alors qu’ils n’étaient pas nés, furent créés dans le creuset du Palace.
Ne nous y trompons pas : si les années Palace furent des années extraordinairement créatives, insouciantes, d’avant sida, elles furent également des "années frics", où la branchitude se consomma progressivement entre privilégiés. Dans le sous-sol du Palace fut fondé à cette fin le Privilège, restaurant puis boite réservée aux Happy few.
Le Palace ne survécut pas à la mort de son créateur : les années sida suivirent, rangeant définitivement les folles années du Palace dans le magasin des souvenirs exaltants nostalgiques.
Rideau.
Il semblerait que depuis 2020 l’ai rejoint dans son tombeau le styliste japonais Kenzō TAKADA (1939-2020). Le fondateur de la marque de vêtements, d’accessoires et de parfums Kenzo s’était installé à Paris vers le milieu des années 1960. Son premier défilé eut lieu en 1970 et c’est en 1977 qu’il se lança dans la commercialisation de parfums. En 1993, il revendit la marque Kenzo au groupe LVMH. Il mourut des suites du Covid-19.
Kenzo avait été une des figures principales des années Palace, dont il restait très nostalgique. Est-ce pour cette raison qu’il se trouverait là ? Je reste pour l’instant au conditionnel dans la mesure où j’attends une attestation plus formelle. L’information apparaît dans Wikipedia (et a donc été ensuite recopié sur de nombreux sites). Sur la tombe Emaer, une petite gerbe floral lui rend effectivement hommage. Nous attendrons donc un peu pour officialiser tout cela.
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