SARTILLY (50) : cimetière

visité en janvier 2020
dimanche 12 janvier 2020
par  Philippe Landru

Aucune personnalité notable au cimetière de Sartilly, et pourtant un monument imposant qui attire le regard, dédié aux caporaux de Souain.


Affaire des caporaux de Souain


En Champagne, le 10 mars 1915 à cinq heures du matin, après deux mois d’accrochages sans résultat tangible dans le secteur et deux récentes attaques infructueuses, les poilus de la 21e compagnie du 336e régiment d’infanterie reçoivent l’ordre d’attaquer de nouveau à la baïonnette et de reprendre les positions ennemies établies au nord du village de Souain (Marne). Devant eux, le terrain est déjà jonché de cadavres et se trouve directement pris sous le feu des mitrailleuses allemandes. De plus, la préparation d’artillerie habituelle avant l’attaque, au lieu de secouer les positions allemandes, envoie ses obus sur la tranchée française et laboure le terrain d’assaut. Dans ces conditions, les hommes de la 21e compagnie, épuisés après plusieurs jours de tranchée, démoralisés par les précédents insuccès, et ayant sous les yeux le spectacle des cadavres de leurs camarades tombés dans les fils de fer intacts, refusent, ce jour-là, de sortir des tranchées.

Confronté à la désobéissance des hommes, le général Réveilhac exige des sanctions. Le capitaine Equilbey, commandant de la compagnie, est alors tenu de transmettre à ses supérieurs une liste portant les noms de six caporaux et de dix huit hommes de troupe, choisis parmi les plus jeunes. Afin de juger les soldats suspectés de désobéissance, le commandement obtient le 6 septembre 1914 l’instauration de conseils de guerre spéciaux. Aucun appel de leur décision n’était possible, et la sentence était exécutée très rapidement, en général dès le lendemain du jugement.

Le verdict acquitte les dix-huit hommes du rang au motif qu’ils ont été choisis arbitrairement et deux caporaux au motif qu’étant en bout de ligne ils ont pu ne pas entendre l’ordre d’attaque. Seuls quatre autres caporaux, trois originaires du département de la Manche, le quatrième de Bretagne, sont condamnés à mort le 16 mars 1915. Ils furent exécutés en début d’après-midi, deux heures avant que n’arrive le recours qui commuait leur peine en travaux forcés.

Ces quatre caporaux étaient Louis Girard (1886-1915), Lucien Lechat [1] (1891-1915), Louis Lefoulon (1884-1915) et Théophile Maupas (1874-1915). Le film de Stanley Kubrick, Les Sentiers de la gloire, est librement inspiré de cette histoire.

Pour Blanche, veuve de Théophile Maupas, leur réhabilitation devint le combat de sa vie : elle mena, avec l’aide de la Ligue des droits de l’homme un long combat afin de l’obtenir enfin en 1934. Dès1923, elle avait obtenu la réinhumation de son mari à Sartilly où elle venait d’être nommée directrice d’école. En 1925 fut inauguré le monument, sur la tombe de Théophile Maupas, sous un bas-relief de Paul Moreau-Vauthier. Blanche repose dans la tombe à gauche du monument.

En dehors de ce monument, les tombes les plus anciennes se trouvent à l’entrée du cimetière. Signalons en particulier celle de Jean Goupil-Channière (+1866), « ayant servi au 13e cuirassier sous Napoléon Ier », celle de Pancrasse Lhoste (+1831), « professeur émérite de mathématiques transcendantes au collège royal de Rouen », et celle de Jacques Lhoste, dont l’épitaphe proclame « approbateur zelé et prudent des sages entreprises, Jacques Lhoste contribua un des premiers à la construction de l’église de Sartilly pour la quelle (sic) le grand pape Pie IX lui accorda sa bénédiction apostolique ainsi qu’à tout ceux qui s’occupaient de ce saint édifice ».


Une bonne page sur les lieux commémoratifs de cette triste affaire : http://www.cndp.fr/crdp-reims/memoire/lieux/1GM_CA/monuments/suippes_caporaux_souain.htm


[1Il fut inhumé à Ferré (35).


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