La Nouvelle Vague est devenue une avant-garde institutionalisée qui persiste à faire croire qu’elle est rebelle alors qu’elle règne partout en maître dans tous les organismes étatiques, de la Cinémathèque à Normale Sup, dans les médias, dans les universités, où l’on « apprend » le cinéma selon les évangiles de saint François, saint Jean-Luc, ou saint Jacques (Rivette) , comme si tout autre discours tenait du sacrilège. En plus, on traque partout une « bête immonde » que l’on cache quand elle se trouve dans ses propres rangs. Autant-Lara, et son œuvre, est aujourd’hui détesté pour son tour de piste avec Le Pen, mais c’est dans « A Bout de Souffle » que Melville joue un nommé Parvulesco, authentique chef de l’OAS Espagne, et il apparaît « pour de vrai » dans un film de Rohmer, « L’Arbre, le Maire et la Médiathèque », où il soliloque sur la vanité de la démocratie, avec François-Marie Bannier. Les idées politiques de Godard étaient prises pour sérieuses alors qu’il ne s’agissait que de postures, d’un dandysme, oscillant de l’extrême droite à l’extrême gauche, mais on occulte la partie droitière de ce petit monde. Ils avaient le droit d’être réactionnaires, un temps, ou toujours comme Rohmer, mais alors il faut être cohérent et le dénoncer partout pour tout le monde, ou être pareillement indulgent. Quand Toubiana et De Baecque font une biographie, ils sont en adoration, et trouvent toutes les excuses à leur idole.
Truffaut était un petit bourgeois déclassé qui a fini par vivre, solitaire, comme un grand bourgeois, avec cuisinière à demeure, et avec des préoccupations sociales assez limitées, c’était son droit, mais ça limitait son cinéma. Faire de lui le grand théoricien indépassable du cinéma est excessif. Il est en France pris pour un mentor alors qu’il était inapte à « penser le monde ». Ses admirateurs savent-ils que son personnage politique préféré était Margaret Thatcher ? C’était encore son droit. Son ami Jean Gruault en était effaré. Taper sur Autant-Lara tout le temps en oubliant les fixettes bizarres de certains est malhonnête.
On peut aimer tous les genres, et ne pas respecter bêtement des oukases qui, sur pièces, les films, se révèlent ineptes, et beaucoup de films flingués par les dinamiteros d’alors sont parfaitement regardables, voire des chefs d’œuvres ; je n’en dirais pas tant de certains pensums de Rivette ou Godard, tant célébrés à leur sortie, et que plus personne ne regarde. La « Nouvelle Vague », ça se limite aux comestibles comédies autour d’Antoine Doinel, pour la plupart des « gens », et ils se disent adeptes de cette école ! Mais qu’ils aillent voir d’autres films, moins festifs, pseudo-théoriques, ils n’y reviendront plus...
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