PUTEAUX (92) : ancien cimetière
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L’ancien cimetière de Puteaux date de 1848 : il a remplacé le cimetière plus ancien qui se trouvait autour de l’église. Il offre une très belle vue sur l’intégralité de la capitale, le bois de Boulogne au premier plan. Il a la particularité d’être contigu au nouveau cimetière de Suresnes dont il partage la topographie, celle d’une pente qui offre ses plus vieux tombeaux sur la partie basse.
- Au premier plan, le cimetière ancien de Puteaux, au second le cimetière nouveau de Suresnes.
Curiosités
Le jeune Bernard Courtault (1923-1943), fusillé au Mont- Valérien ( il appartenait au réseau de résistance chrétienne du lycée Paul Langevin), fut inhumé dans le tombeau familial de ce cimetière. Sa dernière lettre est reproduite en fac-similé sur la tombe.
"Mont-Valérien 3/11/43,
Mon très cher papa,
Cette fois, c’est fini. A huit heures je serai fusillé. Du courage mon petit papa. Le nom des Courtault s’éteint avec moi. Je n’ai pas peur de mourir, mais je crains pour vous que j’aime tant. Je te répète que j’ai été heureux pendant les 20 ans que j’ai vécus sur la Terre, et que tu y es pour beaucoup. Il ne faut pas regretter le passé, ta séparation d’avec maman. J’ai eu 2 foyers, avec chacun leur bonheur. Je meurs en bon chrétien , je viens de communier. Priez pour mon âme, je vous en supplie, maintenant que mon corps disparaît. J’aurais tant voulu vivre, surtout pour vous et ma petite Janette, ma petite chérie, qui peut avoir besoin d’aide. Je la recommande à Colette. Pardonnez moi tout le mal que j’ai pu vous causer. Je vais mourir en souriant, avec le sourire en coin « à la Courtault » que vous me connaissez. Adieu Colette que j’aime tant, Lucette, Jeannette, Marraine, et toi même très cher papa, que je chéris tendrement. Faîtes mes adieux à tous ceux qui m’aiment et que j’aime. Ton fils affectueux Bernard
Encore une fois, merci, mon cher papa, pour tout ce que tu as tenté pour moi. J’ai l’impression qu’on a été très sévère avec moi. Mais je mourrai bravement, sois-en assuré. Rappelez mon souvenir de temps en temps à mon Janot. Je l’aimais tant. J’ai toujours été très bien traité par les soldats allemands et certains étaient vraiment des hommes d’une bonté et d’une charité exemplaires, comme il ferait bon en voir partout. Encore une fois merci, adieu à toi et à tous Bernard"
Une petite stèle dressée à la mémoire des "victimes de la catastrophe du Mont Valerien du 20 décembre 1882" [1]
.
Très peu d’oeuvres d’art dans ce cimetière : la seule statue est un modèle standard que l’on trouve dans d’autres cimetières de la région.
A plusieurs endroits du cimetière, des niches (à chat ?) sont disposées.
Dans la partie la plus basse du cimetière, quelques vieilles chapelles datant du milieu du XIXe siècle résistent encore par miracle.
Les célébrités : les incontournables...
Aucune
... mais aussi
Georges BOUTON (1847-1938) : ingénieur, il s’associa en 1882 avec Armand Trepardoux et le comte (futur marquis) Jules de Dion pour la construction de chaudières à vapeur, de tricycles, puis de voitures à vapeur. Ils fondèrent à Puteaux en 1884 l’usine De Dion-Bouton. Les deux chercheurs mirent au point un moteur à explosion puis prirent un brevet pour un moteur à pétrole en 1890. En 1900, De Dion-Bouton était le plus grand fabricant d’automobiles dans le monde. La société produisit 400 voitures et 3.200 moteurs cette année là. La société fut la première à fabriquer un moteur V8 en série, en 1910. Durement touchée par les conséquences du krach de 1929, la société ne sut pas renouveler sa gamme de voitures et abandonna la production de voitures de tourisme en 1933.
Le champion automobile de Formule 1 Georges GRIGNARD (1905- 1977), qui
participa aux championnats du Monde en 1951 à bord d’une Talbot.
Le sculpteur Eugène GUITTARD (1831-1888), dont la stèle est ornée de son profil en bas-relief.
L’ingénieur alsacien F.G. KREUTZBERGER (1822-1912), qui installa en 1866 un atelier où la plupart des armes et munitions de la Première Guerre mondiale furent fabriquées. Dès 1872, l’atelier ne cessa de s’agrandir et M. Kreutzberger cherche un terrain plus vaste. Il travailla en étroite collaboration avec l’armée qui en prit seule la direction en le rebaptisant l’ "Arsenal". Elle y fabriqua de nombreuses machines-outils et le fameux canon de 75.
L’architecte Charles PLUMET (1861-1928) qui fut, avec Tony Selmersheim, l’un des fondateurs en 1897 du groupe « l’Art pour tous », qui eut sa part dans l’élaboration de l’Art nouveau. Il était l’architecte en chef de l’exposition des Arts décoratifs de 1925. Il réalisa les gares des stations Pelleport, Saint-Fargeau et Porte des Lilas (actuelle ligne 3bis du métro de Paris), construites en surface en béton armé et en ciment de Grenoble, et ornées de céramiques de Gentil & Bourdet. Il est inhumé sous un cube de béton brut, particulièrement sobre. Le monument n’est pas signé, mais il se pourrait qu’il s’agisse d’une réalisation de Robert Mallet-Stevens. Il est dans tous les cas en fort mauvais état.
Jean-Baptiste POMPALLIER (1802-1871) : lyonnais, il fut
consacré évêque à 34 ans. Pour lutter contre la progression du protestantisme, fruit de la domination britannique, le pape charge le jeune Pompallier de l’évangélisation du Pacifique Sud. Après 13 mois de voyage, l’évêque arrive en Nouvelle-Zélande. Au bout de quelques années d’un travail acharné, il arrive à évangéliser le pays en asseyant le catholicisme sur les traditions maories. Loin de les diaboliser, il les utilise afin de faire passer son message en douceur tout en prônant la liberté de culte. Mais en rupture avec sa hiérarchie, il quitte le pays en 1868 pour ne plus jamais y retourner. Il avait été le premier évêque catholique d’Aukland, mais fut inhumé presque anonymement à Puteaux. Ses restes furent transférés en avril 2002 à Hokianga en Nouvelle-Zélande.
Jean Théoxène ROQUE de FILHOL (1824-1889) : maire de Puteaux en 1871, il proclama la neutralité de la commune prise en tenailles entre Versaillais et Communards, mais ses sympathies vis-à-vis des communards lui valurent l’arrestation. Condamné aux travaux forcés à perpétuité, il fut déporté en Nouvelle Calédonie. Grâce à l’intervention du député Emile deschanel, sa peine fut commuée en 20 ans de travaux forcés. Revenu en France en 1879, il fut élu député en 1881 et siégea à l’extrême-gauche jusqu’à sa mort.
Lucien VOILIN (1870-1957) : maire socialiste de Puteaux
de 1912 à 1925, il fut député de la Seine de 1910 à 1919, puis de 1924 à 1927, avant de devenir sénateur de 1927 à 1936. Il fut une des figures marquantes du socialisme dans ce département.
Merci à MC Penin pour les photos Bouton et Roque de F
[1] Voici les détails que donne le Temps de Paris : « La détonation a, on le présume , été causée par l’imprudence d’une ouvrière , Mme Chevet , qui, ayant introduit avec trop de violence un fil de fer dans la culasse d’une des cartouches , avait fait éclater cette pièce. Les ouvrières qui travaillaient autour de Mme Chevet étaient toutes plus ou moins enveloppées de poudre . La flamme s’y communiqua , l’explosion se produisit , l’atelier sauta , et le feu prit aux vêtements des ouvrières
dont la plupart avaient été projetées sur le sol. Immédiatement tout le personnel du fort accourait au secours des victimes. Mais à peine les premiers arrivants étaient-ils près du hangar qu’une seconde explosion se faisait entendre, presque aussi violente que la première. Ce fut un moment terrible. Au milieu des débris, les ouvrières couvertes de brûlures atroces gisaient, poussant des cris déchirants. Plusieurs d’entre elles avaient eu leurs vêtements complètement carbonisés. Toutes étaient blessées ; les visages et les mains présentaient des plaies entièrement noires. Une des femmes , en voulant se sauver, a eu les deux jambe s brisées. Le surveillant Guyon et un ouvrier civil présents dans l’alelier au moment de l’accident ont été atteints de fortes brûlures. Le nombre des blessés transportés à l’hôpital Beaujon est de 14. A l’hôpital Necker, il a été de 9 et l’ouvrier civil".
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