LUNAS (24) : cimetière
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Si la Dordogne est un des départements français les plus touristiques, elle n’apparaît cependant pas sur la liste des incontournables pour les amoureux des cimetières. Les célébrités se comptent sur les doigts d’une main (et encore !) et les cimetières anciens eux, sont de moins en moins nombreux. Depuis quelques dizaines d’années en effet, certaines municipalités rurales s’attachent à désaffecter les cimetières anciens, souvent blottis au pied d’églises parfois très anciennes, pour transférer les sépultures dans un lieu aseptisé, le plus loin possible des habitations. Les nouveaux cimetières sont souvent sans charme, présentant un alignement parfaitement rectiligne de caveaux tous semblables, fournis par le marbrier local, avec des belles allées de castine, où toute végétation est bannie. C’est sûr, le lieu est plus facile à entretenir et surtout, "ça fait propre". Un peu trop à mon goût...
Lunas est le parfait exemple de la destruction organisée et systématique des cimetières de campagne. Petit bourg de moins de 300 habitants, on y trouve encore l’école (de fille/de garçon), la mairie, la salle des fêtes (qui jure avec le reste), de vieilles fermes... Il y a dix ans, en 1998 donc, la municipalité interdisait les inhumations dans le cimetière ancien, situé en plein bourg, au pied de l’église, et en ouvrait un nouveau, à l’extérieur. A présent, les ayant-droits doivent organiser l’exhumation des membres de leur famille, qui seront transférés dans le nouveau cimetière. De l’ancien, il ne restera bientôt plus aucune trace... Si ce n’est un espace vide devant l’église, au mieux laissé en herbe, au pire goudronné. Quelques bancs peut-être...
Bien sûr, ce petit cimetière n’héberge aucun monument d’exception, aucune célébrité... Il n’a pour lui que le charme de la patine et des herbes folles et des noms sur les stèles, qui nous en disent un peu plus sur les familles de ce villages, les lignées que l’on devine, à une époque où l’on quittait rarement son pays, le curé "en poste" pendant 46 ans, les résistants, ...
Je ne chercherai pas à éviter le cliché : avec le cimetière originel, c’est un peu la mémoire du lieu qui disparaît.
Je suis passée à la mairie, suggérer qu’on laisse au moins quelques unes des plus vieilles stèles, histoire que la vocation première du lieu ne soit pas totalement oblitérée (c’est l’usage d’ailleurs dans de nombreux cimetières anglo-saxons désaffectés). On m’a regardée bizarrement : "Pourquoi ? Ça ferait pas net...".
Dans un an, il n’y aura plus rien, sauf le monument au mort.
Il est à noter que le nouveau cimetière héberge la tombe de Laurent RAVIX (1921-1992). Après avoir rejoint de Gaulle à Londres en 1940, il s’engagea dans les Forces françaises libres et combattit aussi bien à l’étranger qu’en France - il participa ainsi aux batailles de Bir-Hakeim, El Alamein, Montefiascone, Herbsheim... Il reçut la légion d’honneur des mains du général de Gaulle en 1945. Il était Compagnon de la Libération.
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