HARTSDALE : Ferncliff cemetery
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Le cimetière de Ferncliff, qui est un cimetière non-confessionnel, ouvrit ses portes en 1902. Situé à environ 40 kms du centre de Manhattan, il n’est pas sans rappeler le Forest Lawn Mémorial Park Cemetery de Los Angeles qui lui servit de modèle. Malgré la distance, il est incontestablement un cimetière newyorkais, ce qu’atteste le grand nombre de célébrités qui y reposent. Avec ses 25 hectares, il peut être comparé au cimetière Montparnasse, même si les topographies des deux lieux ne sont pas du tout les mêmes.
Visiter Ferncliff : les 12 travaux d’Hercule
Aller au Ferncliff cemetery sans être motorisé relève d’un parcours du combattant que seuls les plus motivés des taphophiles feront ! Il faut en un premier temps prendre le métro (line bleue Harlem) et descendre à White Plains (et pas Hartsdale, où se trouve pourtant le cimetière). Arrivé là-bas, il faut prendre un bus qui vous arrête au milieu de nowhere : dès lors, il faut avoir un plan pour comprendre qu’il faut monter l’interminable pente qui mène sur un plateau sur lequel le cimetière se devine au loin. Si vous avez l’impression d’avoir fait un long trajet, c’est pourtant loin d’être terminé compte-tenu de la superficie du lieu, dans lequel les dénivelés vous couperons définitivement le souffle. Bien entendu, on peut prendre un taxi qui simplifie la tâche (attention néanmoins à ce qu’il mette le compteur, sinon il s’amuse à vous faire payer des fortunes), mais pour revenir, même topo dans le même sens. Et ne vous attendez pas à trouver un taxi qui vous ramènera à la gare : le cimetière est nowhere vous dis-je !
Arrivé sur le lieu, on se dit qu’on a fait le plus gros : que nenni ! D’abord, pour avoir un plan -très rudimentaire- du cimetière (ainsi qu’un listing des principales vedettes du lieu), il faut se rendre au bâtiment de l’administration qui se trouve derrière le Ferncliff mausoleum (personnel très aimable, en anglais évidemment). A partir de là, c’est un autre parcours du combattant qui vous attend ! Les personnalités que vous désirez visiter se trouvent dans les différents mausolées où sur les pelouses. Même si le listing indique les coordonnées des plaques, rien n’est simple. Les numéros des plaques sur les pelouses ne se suivent pas forcément, car les parcelles furent loties à des époques différentes. Concernant les mausolées, en particulier le Ferncliff, c’est encore plus compliqué : les cendres sont disposées sur plusieurs niveaux (A au rez-de-chaussée, AA au 1er étage...) MAIS on ne sait jamais vraiment dans quel bâtiment on est (en outre, il n’y a guère de logique alphabétique en raison des agrandissements ! Et en dehors du mausolée Rosewood, vous ne rencontrerez personne pour vous aider !
Vous voilà prévenu !
topographie des lieux
Le cimetière de Ferncliff dispose de trois mausolées, d’une chapelle et d’un crématorium. Le Ferncliff mausoleum fut construit en 1928, Shrine of Memories en 1959, et le Rosewood en 1998.
- Ferncliff mausoleum
- Shrine of Memories
Le Ferncliff mausoleum a une architecture classique, mais les couloirs sont sombres sans vitre pour laisser entrer la lumière naturelle. Les deux suivants laissent une beaucoup plus grande place aux ouvertures et à la lumière. Les mausolées sont très luxueux, usant -et abusant parfois- du marbre et du bronze (grandes portes monumentales). Tout cela n’empêche néanmoins pas un aspect "nouveau riche" qui ne respire pas l’égalité funéraire. Les urnes se trouvent dans les parois recouvertes de plaques en marbre. Certaines forment des alcôves familiales, voire privées, qui se signalent alors par la présence de très beaux vitraux, unique ostentation artistique du lieu.
Certaines alcôves sont aménagées en salons, avec fauteuils !
Par certains aspects (couloirs, coursives, escaliers flottants...), les mausolées ressemblent à cette certaines galeries marchandes clinquantes des grands malls américains.
A Ferncliff, vous ne trouverez aucune statue ou buste en bronze. Si c’est l’aspect artistique des sépultures qui vous intéressent, passez votre chemin !
Face aux mausolées se trouvent de vastes pelouses, pas toutes au même niveau. Ferncliff est l’un des très rares cimetières qui n’autorise pas les pierres tombales verticales dans ses parcelles extérieures. Toutes les pierres tombales extérieures affleurent le sol. Cette caractéristique facilite l’entretien du terrain du cimetière. Il existe à l’entrée plusieurs pierres tombales édifiées avant que cette politique n’ait été instituée.
Ces pelouses offrent donc des vagues ondulatoires de plaques tombales modestes, toutes quasiment identiques. Comme nous l’avons dit, retrouver une plaque prend du temps, même quand on en possède les données.
Le crématorium de Ferncliff couvre quant à lui 10% des besoins de la ville de New York.
Célébrités : les incontournables...
Il ne s’agira pas ici de présenter toutes les "célébrités" du cimetière : grands industriels, figures de la vie culturelle, du sport, sont pour la plupart inconnus en France. Pour les puristes, il sera facile de trouver des listes les plus exhaustives possibles, que ce soit sur la page Findagrave du cimetière ou sur la page wikipedia américaine (plus riche)... Comme d’habitude pour les cimetières étrangers, je me bornerai à présenter celles qui ont une notoriété en France.
Je signalerai également la mémoire de personnalités qui ne reposent pas à Ferncliff mais qui s’y firent crématiser :
L’acteur Yul BRYNNER, dont les cendres reposent en France.
Le marionnettiste Jim HENSON (1936-1990), créateur du culte Muppet Show mais également d’autres séries pour la télévision (Fraggle Rock, Sesame street...). Ses cendres furent dispersées dans son ranch de Santa Fe, au Nouveau Mexique.
L’acteur Christopher REEVE (1952-2004), qui restera sans doute, malgré les films postérieurs, l’incarnation de Superman. Ses cendres furent remises à la famille sans que l’on sache ce qu’elle en fit.
C’est ici qu’avait été inhumé le compositeur hongrois Béla BARTÓK jusqu’à son transfert à Budapest en 1988.
Reposent en revanche en ce lieu :
AALIYAH (Aaliyah Dana Haughton : 1979-2001) : chanteuse et actrice, elle devint célèbre durant les années 1990 grâce à plusieurs collaborations avec Timbaland et Missy Elliott. Elle mourut dans un accident d’avion.
Le compositeur Harold ARLEN (1905-1986), qui fut l’un des compositeurs les plus importants du XXe siècle avec une œuvre comprenant plus de 400 chansons, dont certaines ont fait le tour du monde. La plus célèbre, Over the Rainbow, extraite de la comédie musicale Le Magicien d’Oz, a remporté l’oscar de la meilleure chanson originale en 1940. On lui doit également Ding-Dong ! The Witch Is Dead (pour le même film), ou encore Stormy Weather.
L’écrivain américain James BALDWIN (1924-1987), auteur de romans, de poésies, de nouvelles, de pièces de théâtre et d’essais. Ses essais explorent les non-dits et les tensions sous-jacentes autour des distinctions raciales, sexuelles et de classe au sein des sociétés occidentales, en particulier dans l’Amérique du milieu du XXe siècle. Figure majeure en littérature des droits civiques et de ceux des homosexuels, son parcours et ses combats furent récemment remis en lumière grâce à I Am Not Your Negro, film documentaire de Raoul Peck qui remporta en 2017 le César du meilleur film documentaire.
Le chef d’orchestre et chanteur de jazz américain Cab CALLOWAY (Cabell Calloway : 1907-1994), qui devint en France l’inspirateur du mouvement zazou qui adopta son style vestimentaire à la fois chic et excentrique (En 1933, sa chanson Zah Zuh Zaz connut un destin inattendu : en effet cinq ans plus tard, en France, le chanteur Johnny Hess reprit l’onomatopée comme adjectif dans son titre Je suis swing (« Je suis swing, je suis zah zuh »), ce qui marqua l’origine du nom du mouvement Zazou durant l’Occupation allemande. On lui doit le tube Minnie The Moocher.
L’actrice Joan CRAWFORD (Lucille Fay Lesueur :1904-1977). Star emblématique de l’âge d’or d’Hollywood, elle a été l’une des actrices américaines dont la carrière a été la plus longue. Sa carrière couvre ainsi, sur plus de quarante ans, les différentes époques des grands studios américains, du cinéma muet jusqu’aux années 1960. Elle joua les filles délurées (les « flappers ») des années folles, les jeunes femmes arrivistes dans les années 1930, les victimes dans des mélodrames des années 1940 et 1950. Elle obtint un Oscar en 1945 pour Le Roman de Mildred Pierce. Son visage fut celui qui inspira celui de la Reine-sorcière de Blanche-Neige. Elle repose auprès de son dernier époux, le PDG de Pepsi-Cola, Alfred N. Steele (1900-1959), qui lui légua la société.
L’actrice Judy GARLAND (Frances Ethel Gumm : 1922-1969), dont la carrière ne saurait se résumer au Magicien d’Oz, à Liza Minelli (sa fille) et à son accoutumance à l’alcool et aux médicaments. Elle fit partie de cette génération d’actrices qu’Hollywood façonna de manière souvent très dure pour camper les différents rôle qu’on leur destinait. En 2017, ses restes furent transférés au Hollywood Forever de Los Angeles à la demande de la famille.
Le danseur et chorégraphe russe Michel FOKINE (Михаил Михайлович Фокин : 1880-1942), qui fut premier danseur et maître de ballet du théâtre Mariinsky. Il fut chorégraphe des Ballets russes de Serge de Diaghilev de 1909 à 1923. Après avoir ouvert une école de danse à New York en 1921, il retourna régulièrement aux États-Unis et s’y installa en 1923. Entre 1905 et sa mort, il créa une soixantaine de ballets.
MALCOLM X (Malcolm Little : 1925-1965) : prêcheur musulman afro-américain, orateur et militant des droits de l’Homme, il fut aux yeux de ses supporteurs un défenseur impliqué des droits des Afro-Américains ayant mis en accusation le gouvernement des États-Unis pour sa ségrégation de la communauté noire. En revanche, ses détracteurs l’accusèrent d’avoir alimenté une forme de racisme, le suprémacisme noir et la violence. Membre du mouvement Nation of Islam, il s’éloigna finalement de celui-ci en 1964, principalement en raison de désaccords sur la passivité de l’organisation dans le combat contre la ségrégation raciale. Il évolua alors, peu avant sa mort, vers des positions socialistes et internationalistes. Il fut assassiné. Un drapeau de Nation of Islam se trouve sur sa tombe.
Song MEILIN (Mme Tchang Kaï-chek : 1898-2003), qui fut l’épouse de Tchang Kaï-chek, ce qui lui a valu d’être d’abord la première dame de la république de Chine, puis celle de Taïwan. Elle tint un rôle important dans l’histoire de la Chine pendant l’entre-deux-guerres et la Seconde Guerre mondiale, puis après-guerre à Taïwan. Ayant vécu longtemps aux États-Unis, anglophone — ce qui lui valut en son temps une célébrité médiatique en Occident — elle assista efficacement son mari dont elle fut la secrétaire, la conseillère, ainsi que l’interprète et l’ambassadrice auprès des Américains. Elle mourut à l’âge de 105 ans dans son appartement de Manhattan. Elle fut inhumée ici où reposent d’autres membres de sa famille. Le transfert de ses restes à Tzuhu, aux côtés de ceux de Tchang Kaï-chek, est prévu mais toujours reporté. Le couple avait de toute façon exprimé le désir d’être enterré en Chine dès que la situation politique le permettrait.
Thelonious MONK (1917-1982) : pianiste et compositeur de jazz américain, il fut célèbre pour son style d’improvisation, ainsi que pour avoir écrit de nombreux standards de jazz. Il est souvent considéré comme l’un des fondateurs du bebop.
Basil RATHBONE (1892-1967) : acteur britannique, il est surtout connu pour avoir interpréter le personnage de Sherlock Holmes à 14 reprises au cinéma.
Charles REVSON (1906-1975) : homme d’affaires et philanthrope américain, il est principalement connu comme pionnier de l’industrie cosmétique, créateur et promoteur de l’entreprise Revlon pendant cinq décennies.
Le réalisateur et producteur Preston STURGES (1898-1959), qui fut le refondateur de la comédie loufoque en renouvelant ses codes de l’intérieur. On lui doit une douzaine de films seulement, réalisées dans les années 1940.
Edward SULLIVAN (1901-1974) : animateur sur la chaîne CBS, il fut une figure mythique des Etats-Unis pour son émission de variété, The Ed Sullivan Show qui remporta un franc succès entre 1948 et 1971. L’émission était un événement national chaque dimanche soir, ayant permis une première exposition d’artistes de l’étranger pour le public américain.
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