Marseille (13) : sous la future station de métro a surgi... le cimetière des Italiens
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Il faudra certainement une stèle, une plaque, voire une petite salle en forme de musée. La station de métro "Guy Hermier" (15e), futur terminus de la ligne 2 Dromel-Bougainville, devra garder une trace de la découverte effectuée dans le quartier : le cimetière des Petites Crottes ou cimetière des Italiens.
Sur le chantier, ont été mis au jour des dizaines de tombes où reposent, en partie, des Transalpins venus travailler dans l’industrie au XIXe. Des Transalpins dont on sait qu’ils étaient en grande partie installés dans le quartier du Panier mais aussi aux Crottes et à la Cabucelle. Où vécut le plus célèbre d’entre-eux, Ivo Livi, dit Yves Montand.
"Le cimetière des Petites Crottes a été construit en 1784 et il a disparu en 1905, explique Anne Richier, archéologue qui travaille sur place avec l’Institut National de Recherche Archéologique Préventive (Inrap). On savait qu’il était situé dans le quartier mais on ne savait pas vraiment où. L’année dernière, 330 tombes avaient été découvertes. Au total, il devrait y en avoir environ 600. On désigne le cimetière comme celui des Italiens parce qu’ils ont fait partie de la vague d’immigrés qui ont vécu dans le quartier."
Travail de mémoire en cours
Mais les premiers défunts à être inhumés dans ce cimetière étaient les Marseillais de l’époque, des meuniers, des aubergistes, des gens humbles qui vivaient dans un univers de champs et de bastides. "C’était jusqu’à la fin du XVIIIe, poursuit l’archéologue. Après, il y a donc eu les Italiens qui ont travaillé dans les huileries, les savonneries. Ils étaient employés du port aussi. À cette période, en pleine industrialisation, Marseille avait besoin de main-d’oeuvre."
Les Italiens pratiquaient-ils des rites funéraires un peu différents ? Quel était leur état de santé ? Autrement dit, comment ont-ils vécu ? Le travail des archéologues devrait permettre d’enrichir un peu plus cette page de l’histoire de l’immigration à Marseille.
"Les os vont être savonnés, lavés, ajoute Anne Richier, puis étudiés par les archéologues et les anthropologues." Puis, ils seront conservés dans une osthéotèque comme il en existe à l’Hôpital Nord. Mais au fait, comment peut-on faire disparaître un cimetière ? "Comme l’industrialisation était très importante, conclut l’archéologue, le cimetière a servi de dépotoir où les déchets ont été jetés."
Voilà comment a été enseveli le cimetière des Petites Crottes, qui renferme l’histoire d’une communauté qui a marqué la ville. Et dont sont issues des centaines de familles marseillaises. Comme en convenaient hier Eugène Caselli et Patrick Mennucci, la future station de métro devra en être la mémoire.
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