A Braunau sur Inn subsiste la modeste tombe de Paula Hitler, soeur du Führer. Elle se tint à l’écart de la politique de son frère et des fastes nazis et mena une vie plutôt tranquille. Quelques [Néo-]Nazis sont bien venus en pélerinage, mais c’était plutôt vain et n’a jamais attiré la foule des nostalgiques. Inconnue elle était, inconnue elle demeure.
Il en va tout autrement de la tombe de Mussolini, dans le village de Predappio en Romagne, région (communiste !) de Forli. Il y a quelques années, alors que j’étais en cure dans la petite station voisine de Castrocaro Terme, j’ai fait un détour par Predappio. Je me suis alors retrouvé en plein pélerinage de « Camise nere », avec certains de ces messieurs plus ou moins engoncés dans leurs uniformes et arborant force médailles d’anciens combattants. La police était présente pour empêcher des débordements ou manifestations d’opposants mais à part quelques curieux, pas grand ramdam, sauf les cars déposant leur cargaison de vieux fascistes, anciens des Balillas ou des Fils de la Louve. Aussi quelques jeunes fascistes d’aujourd’hui, tendant le bras. Pas mal de touristes prenant des photos et visitant le tombeau, entouré de quatre faisceaux de licteurs. Le buste du Duce au centre, flanqué...de la Vierge Marie et du Christ ! La tombe du Duce est une attraction touristique pour le village. On y vend des bustes de Mussolini, quantité de photos, et dans cette Romagne communiste, le coeur de beaucoup reste encore lié au dictateur. Il est vrai qu’il a bien mieux joué la carte populiste que le Führer. Et vous pouviez alors encore entendre : « Ah, s’il n’avait pas suivi Hitler, sa politique belliciste et antisémite, Mussolini serait... » Personne évidemment ne songerait à dire cela d’Hitler, indissociable du racisme antisémite et des camps. Mais aujourd’hui, avec le nouveau gouvernement associant la Lega, véritable héritière du fascisme pur et dur (il faut se souvenir aussi que le dirigeant de « Forza Italia », composante majeure de la Lega, héritier du MSI lui-même avatar du Parti National Fasciste, s’était fait photographier tenant dans ses bras une enfant somalie, comme pour dire : « vous voyez, nous ne sommes pas racistes... ») et le Mouvement 5 étoiles de l’ex-comique Beppe Grillo (tout le contraire de l’humanité d’un Coluche et bien plus proche de la méchanceté vicieuse d’un Dieudonné), on peut craindre à nouveau. Alors pour revenir aux tombes, moins on en parlera moins il y aura de public nostalgique. Dans le même esprit, Gori, ville géorgienne qui vit naître Staline, a un musée construit du temps du dictateur (inhumé à Moscou, au monastère Novodievitchi, si on ne l’a pas à nouveau déplacé, un retour étonnant pour un homme qui débuta sa carrière comme séminariste) qui est l’attraction majeure de la ville. Des nostalgiques de la défunte URSS s’y pressent, à côté des touristes US venus se donner un frisson, les guides ont une magnifique langue de bois (« Staline n’a commis aucun crime, la Grande Terreur fut le fait des Russes de son entourage ») A la boutique du musée on vend à côté des bustes en toutes matières du dictateur, des porte-clefs Staline, du papier à lettre Staline, des broches Staline, et même - nous sommes dans un pays viniviticole après tout - du vin Staline ! Et dans la rue ou les cafés, même s’il n’y a plus de NKVD, il vaut mieux ne pas dire du mal du Petit Père !
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