ARBOIS (39) : cimetière

mardi 9 août 2011
par  Philippe Landru

Parmi les cimetières dotés d’une forte empreinte familiale, le cimetière d’Arbois figure en bonne place. On peut dire qu’il est pour le célèbre Louis Pasteur ce que Villequier était pour Victor Hugo : à la fois le lieu des attaches et, paradoxe, celui où l’on ne résidera pas pour l’éternité ! On rappellera effectivement que Pasteur repose sous la crypte de l’Institut qui porte son nom, à Paris.

Le petit cimetière d’Arbois est donc pour Pasteur celui des racines (c’est là que reposent ses parents, dans deux tombeaux différents), mais également celui des douleurs de voir mourir ses enfants très jeunes (Jeanne, morte de la typhoïde en 1859, Camille d’une tumeur du foie en 1865, Cécile de la typhoïde en 1866). On peut voir les différentes stèles de la famille dans la jolie partie ancienne du cimetière, les vieilles tombes possédant encore leurs entourages rouillés.

Le culte de Pasteur est assez fort dans la région pour qu’on ait indiqué par des panneaux les emplacements des tombeaux de famille.

On sait moins en revanche que parmi les descendants de Pasteur inhumés à Arbois repose son petit-fils, l’académicien français Louis PASTEUR VALLERY-RADOT (1886-1970).

Médecin des hôpitaux de Paris, il devint membre de l’Académie de médecine en 1936. En 1939, il obtint le titre de professeur à la faculté de Médecine de Paris. Ses recherches portaient surtout sur les allergies et les maladies rénales. Il publia de nombreux articles et ouvrages à caractère scientifique. Il œuvra également à garder vivante la mémoire de son grand-père Louis Pasteur, annotant et publiant sa correspondance et lui consacra plusieurs volumes. Il joua un rôle actif dans la Résistance en tant que Président du comité médical de la Résistance. À la Libération, il dirige le ministère de la Santé publique, et fut brièvement député de Paris entre 1951 et 1952. Il fut élu à l’Académie française en 1944, puis nommé en 1959 membre du Conseil constitutionnel (jusqu’en 1965). Membre du tribunal ayant à juger les généraux insurgés d’Algérie, ce fervent gaulliste se brouilla en cette occasion avec le général de Gaulle, ce qui assombrit ses dernières années.

Il repose dans le caveau de ses parents, à savoir Marie-Louise (1858-1934), fille de Pasteur, et René VALLERY-RADOT (1853-1933). Ce dernier fut secrétaire de François Buloz, directeur de la Revue des Deux Mondes, puis secrétaire du président du Conseil Charles de Freycinet. Entre 1879-1895, il aida son beau-père à affronter ses détracteurs en prenant des contacts avec la presse, en répondant aux lettres des polémistes et en rédigeant ses discours. Beaucoup plus diplomate que son beau-père, il réussissait à lui faire réécrire des lettres rédigées sous le coup de la colère, car l’illustre savant était fort irascible. Il fut l’auteur de la première biographie de Louis Pasteur, mais aussi d’ouvrages traitant d’autres sujets.

Peu classique, on trouve dans le cimetière la tombe de Antoine et Charles Ducret, décédés en janvier 1871 « par le feu des Prussiens ».

On pourrait penser que l’évocation de la famille Pasteur accaparerait toute l’attention taphophilique du cimetière. Il n’en est rien car une autre personnalité de l’histoire y a sa dernière demeure : le général Jean-Charles PICHEGRU (1761-1804).

Né au sein d’une famille de paysans, il reçut une solide éducation puis devint répétiteur de mathématiques au Collège militaire de Brienne, où il enseigna Napoléon Bonaparte. Il s’engagea ensuite, prit part à la guerre d’indépendance des États-Unis d’Amérique, puis aux batailles révolutionnaires (il eut l’appui de Saint-Just et de Robespierre). Commandant en chef des armées du Rhin et de la Moselle fin 1793, il remplaça Jourdan début 1794 à la tête de l’armée du Nord : en un an, il conquit la Hollande.

Pourtant, contacté par un agent royaliste, il trahit. Le parti blanc lui promettait un million au comptant, une rente de 200 000 francs, le maréchalat, le gouvernement d’Alsace et le château de Chambord. Soupçonné de trahison, il dut démissionner mais restant populaire, il obtint l’ambassade de Suède. Député des Cinq-Cents en 1797, et président de ce corps, il fut convaincu de collusion avec le prince de Condé, arrêté et condamné à la déportation en Guyane. Il s’échappa et gagna Londres, participa à la conspiration de Cadoudal, débarqua en Normandie en janvier 1804, mais fut livré par un de ses anciens officiers. Il se suicida -ou fut opportunément « suicidé »- par pendaison dans sa prison du Temple.

Il fut en un premier temps inhumé dans une tombe anonyme du cimetière Sainte-Catherine (aujourd’hui disparu) de Paris. Un appel aux dons fut lancé pour lui donner une sépulture plus décente. Un tombeau fut donc construit, mais il fut rapidement menacé par la désaffection programmée du cimetière. C’est en 1862 seulement qu’eut lieu le transfert vers le cimetière d’Arbois, d’où Pichegru était natif…Encore que de sérieux doutes demeurent quant à la dépouille qui se fit exhumer. Pour plus de détails sur les péripéties du corps de Pichegru, je renverrais tout simplement vers l’article concernant Pichegru sur le site de Marie-Christine Penin.


Merci à Nicolas Badin pour les photos.


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vendredi 14 février 2014

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