A la recherche des ossements perdus de Cervantes
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Une équipe de scientifiques va aujourd’hui tenter de confirmer que l’auteur de Don Quichotte aurait bien été enterré dans un couvent madrilène. Sa trace disparaît en 1673. Une aventure racontée par le quotidien espagnol El País.
Miguel de Cervantes Saavedra (1547-1616) connaîtra bientôt une nouvelle libération. Une mission a été lancée pour voler à son secours. Soutenue par l’Académie royale espagnole, vue d’un bon œil par l’archevêché de Madrid et portée par l’enthousiasme d’une équipe d’experts et de techniciens, elle vient d’obtenir les fonds nécessaires à sa réalisation. Elle consistera à balayer, avec un géoradar, le sous-sol et les murs du couvent madrilène où l’écrivain repose depuis 1616. Le bâtiment occupe 3 000 mètres carrés entre les rues Las Huertas et Lope de Vega.
La première libération du prince universel des lettres a eu lieu en 1580 à Alger, où il était resté durant cinq ans prisonnier des Turcs [il avait été capturé alors qu’il rentrait au pays après la bataille de Lépante (1571)]. Juan Gil, un moine trinitaire, paya alors une rançon de 500 écus pour que l’écrivain puisse rentrer en Espagne. Aujourd’hui, les restes de Cervantes depuis près de quatre siècles quelque part à l’intérieur du couvent seront peut-être sauvés de l’oubli par des recherches scientifiques s’appuyant sur des technologies de pointe. Et, une nouvelle fois, c’est l’Ordre trinitaire [fondé en 1194 pour racheter les chrétiens prisonniers des Maures] qui a remis la clé de la prison de Miguel de Cervantes. Il est en effet propriétaire du couvent où se trouvent les ossements de l’écrivain. Les préparatifs de cette recherche ont commencé il y a dix-huit mois, lorsque le spécialiste en imagerie radar Luis Avial a soumis à l’historien militaire Fernando Prado l’idée selon laquelle "Cervantes [était] enterré dans un bâtiment de la rue Las Huertas, mais on ne [savait] pas exactement où". Ces propos ont piqué l’intérêt de M. Prado, qui a décidé de mettre sur pied un plan de sauvetage en bonne et due forme.
Le couvent madrilène, édifié en briques en 1609, a été reconstruit en 1673. Il est constitué de trois tours, d’une couverture en tuiles, d’un cloître, de plusieurs salles, de couloirs, d’une vingtaine de cellules dotées de grilles et de jalousies, ainsi que d’un jardin d’agrément avec un mandarinier. L’étude réalisée en 1870 par Mariano Roca de Togores, marquis de Molinos, avance que Cervantes aurait été enterré près du cloître. Certains situent sa dernière demeure dans une niche murale près du jardin, d’autres encore dans l’église, où se trouve une plaque commémorant son enterrement et celui de sa femme, Catalina de Salazar. "Si l’archevêché et l’Académie espagnole l’autorisent, il n’y a aucun inconvénient à effectuer les recherches", affirme sœur Amada, la Mère prieure du couvent, qui a accueilli avec enthousiasme le projet. "L’Académie a donné son accord à des investigations fondées sur un projet sérieux et crédible", confirme Darío Villanueva, secrétaire de cette institution. Fernando Prado s’est également adressé au gouvernement régional, qui supervise les fouilles archéologiques, et à José Luis Montes, chargé du patrimoine au diocèse. "Nous voyons cette initiative avec sympathie et il n’y aura aucun obstacle à sa concrétisation lorsque la demande officielle de fouilles aura été déposée", a assuré ce dernier.
Les difficultés restent cependant nombreuses. La principale, c’est que la piste des restes de Cervantes a été perdue il y a longtemps, en 1673 [à la reconstruction du couvent]. Mais l’enthousiasme des chercheurs semble pouvoir venir à bout de la marge de manœuvre induite : "Selon des sources religieuses, les ossements de Cervantes ont été emportés dans un autre couvent trinitaire voisin", explique Darío Villanueva, "et rendus plus tard, en même temps que d’autres, quand les travaux ont été terminés à la fin du XVIIe siècle". C’est à ce moment que la piste de la sépulture de l’écrivain a été perdue, mais certains documents attestent que ses restes se trouvent toujours à l’intérieur du couvent.
Un cercueil marqué "MC". Et si c’était celui de Cervantès ?
Sciences et Avenir - 03 mars 2015
La bière a été retrouvée dans la petite église des Trinitaires, à Madrid, où une équipe de scientifiques cherche depuis un an la dépouille de l’auteur de don Quichotte, inhumé en 1616.
400 ans après sa mort, l’auteur de don Quichotte est le héros d’une quête digne de son Chevalier de la Triste-Figure : un groupe de scientifiques s’est lancé depuis le 28 avril 2014 à la recherche des ossements de Miguel de Cervantès. Ils pourraient être parvenus à leurs fins. En effet un cercueil corrodé portant les initiales "MC" a été découvert en Espagne dans la crypte d’une chapelle du couvent des Trinitaires de Madrid. Il pourrait s’agir de celui de Cervantès, inhumé en 1616.
La chasse à un mortel trésor
Décédé à Madrid le 22 avril 1616, l’écrivain espagnol fut enterré le 23 avril - cette date a été choisie pour marquer le jour officiel de son décès, suivant la coutume de l’époque - dans la petite église des Trinitaires. Où précisément ? Pour le déterminer, les chercheurs ont sillonné l’église avec un radar portatif, dont les ondes ont scruté le plancher du lieu saint pour détecter les ossements qui y sont dissimulés. Lequel sera celui Cervantès ? Difficile à dire, des restes de plusieurs dizaines de squelettes ayant déjà été retrouvés... Reste l’espoir que des os "collent" aux indices semés par l’auteur du Quichotte, une description peu flatteuse qu’il a laissée de lui-même. "Cervantès lui-même se définissait comme ayant le dos voûté, il souffrait probablement d’arthrose, avec un nez busqué et, peu avant sa mort, il se décrivait comme n’ayant que six dents dans sa bouche", expliquait ainsi en 2014 à l’AFP l’anthropologue légiste Francisco Etxeberria.
"Nous cherchons donc un homme d’environ 70 ans à qui il manque beaucoup de dents et avec de l’arthrose dans le dos" précisait Etxeberria. Et puis il y a sa plus célèbre caractéristique : la blessure reçue lors de la bataille de Lépante (1571). C’est lors de cette légendaire bataille navale, remportée par la Sainte Alliance sur les Turcs, que Cervantès fut blessé à la poitrine et à la main gauche, dont il a ensuite perdu l’usage. Cette blessure de guerre lui a valu son surnom de "manchot de Lépante". "Il n’avait plus l’usage de la main. Elle était atrophiée" et ceci pourrait aujourd’hui se voir sur les ossements, commentait Francisco Etxeberria, précisant que sa main gauche n’avait pas été amputée.
À Madrid, les ossements retrouvés seraient bien ceux de Cervantès
Le Figaro - 12 mars 2015
Les recherches de l’équipe de scientifiques assurent que les restes de la dépouille du célèbre auteur de Don Quichotte, auraient été identifiés dans l’église des Mères Trinitaires située dans le centre historique madrilène.
Depuis plusieurs mois, une équipe de chercheurs procède à des fouilles visant à retrouver le cercueil de Miguel de Cervantès. Leurs efforts pourraient bien avoir été récompensés : les restes des ossements du célèbre écrivain castillan et de son épouse, Catalina de Salazar, pourraient bien avoir été identifiés dans l’église des Mères Trinitaires - situé dans une partie du centre historique de Madrid, « Las Letras » - où Cervantès a été enterré, selon des sources proches du projet.
Au mois de janvier 2015, trois tombes non identifiées avaient déjà été découvertes. D’après l’EFE, l’agence de presse officielle espagnole, le Conseil Municipal madrilène a cependant calmé l’exaltation nationale en signalant qu’« à l’heure actuelle, il est impossible de garantir l’authenticité de la trouvailles des restes de Cervantès et son épouse ». Les recherches menées dans l’une des cavités de la crypte de la chapelle madrilène auraient conduit les archéologues et anthropologues sur la bonne piste. « Des morceaux de cercueil, des bouts de bois, des pierres, quelques fragments d’os et effectivement un morceau d’une planche comporte des clous reproduisant les initiales M.C. », avait été retrouvés, selon les explications de l’anthropologue Francisco Etxeberria, qui dirige l’équipe de chercheurs, lors d’une conférence de presse données dans la capitale de la péninsule ibérique. À l’issue des analyses de laboratoires, la planche des initiales appartiendrait bien au cercueil du père de Don Quichotte.
Selon les sources proches des scientifiques, les recherches se seraient basés non pas sur la sépulture exacte où le dramaturge a été enterré en 1616 mais sur le site où ses os auraient été déplacés après la rénovation de l’Église, c’est à dire après 1673. Ayant minutieusement étudié les mètres carrés parcourus par le radar sur le sol en parquet qui entoure l’autel, les techniciens ont ainsi eu la joie de découvrir les images du sous-sol du bâtiment en briques rouges. Par un système d’ondes électromagnétiques, il leur a été possible de détecter si le sol était perturbé, comme cela aurait pu être le cas afin de creuser une sépulture. Ils ont ensuite eu 220 mètres carrés à examiner lors de la première phase des recherches.
« Inscrire son nom sur une plaque pour la différencier d’une tombe anonyme »
Miguel de Cervantès avait souffert de ces blessures en participant à la bataille navale de Lépante, ayant opposé en 1571 une coalition hispano-vénitienne à l’Empire ottoman, au large de Lépante (Grèce). Né en 1547, dans la vieille ville universitaire d’Alcala de Henares, près de Madrid, Cervantès est considéré par beaucoup comme le « père du roman moderne » pour son œuvre Don Quichotte, publiée en deux parties, en 1605 et 1615. Il est mort dans la pauvreté le 22 avril 1616, et a été enterré selon les écrits de l’époque, dans cette église. Outre son œuvre, il a notamment donné son nom à l’Institut Cervantes, qui assure la promotion et l’enseignement de la langue espagnole dans le monde.
« Pourquoi rechercher les restes de Miguel de Cervantès ? Parce que c’est un personnage d’envergure mondiale, parce qu’au fond, toute l’humanité lui est redevable. Et parce nous avons l’opportunité et disposons de la technologie capable de retrouver ces restes, pour les sortir d’une tombe anonyme et les couvrir avec une plaque commémorative », avait expliqué l’an dernier Fernando de Pardo, historien en charge des recherches. « Il nous a tant donné, nous allons au moins tenter de faire quelque chose pour pouvoir inscrire son nom sur une plaque pour la différencier d’une tombe anonyme. »
L’Espagne enterre officiellement Miguel de Cervantes, 400 ans après sa mort
dépêche - 11 juin 2015
L’Espagne a offert à son plus grand écrivain, Miguel de Cervantes, un enterrement officiel, jeudi, près de 400 ans après sa mort, dévoilant un monument funéraire contenant des fragments d’os récemment exhumés qui incluraient ceux de l’auteur de Don Quichotte.
La mairesse de Madrid Ana Botella a placé une couronne de lauriers au pied du monument au cours d’une cérémonie incluant un hommage militaire, puisque Cervantes, considéré comme le Shakespeare espagnol, a aussi été soldat pour l’Espagne.
Les ossements ont été exhumés par des experts, plus tôt cette année, après une recherche dans le cimetière où l’on savait que Cervantes avait été enterré en 1616.
Les travaux de constructions effectués au fil des siècles ont rendu plus difficile de déterminer exactement où se trouvent les os. Les enquêteurs sont convaincus que les ossements de Cervantes font partie des restes de 15 corps retrouvés dans la crypte de l’église des Trinitaires, mais ils ne peuvent pas le prouver.
Ils ont cependant quelques indices. Cervantes est décédé à l’âge de 69 ans et il a écrit qu’il n’avait que six dents à ce moment. Il avait également des cicatrices.
En janvier, des archéologues ont annoncé avoir trouvé des fragments d’un cercueil portant les initiales « M.C. » et contenant des ossements. Ils ont conclu qu’il s’agissait de ceux de l’auteur, même sans preuve définitive.
La mairesse Botella estime que le monument funéraire permet d’effacer une dette envers Cervantes et la culture espagnole.
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