SAINT-DENIS (93) : ancien cimetière
par
Dans cette ville et dans le domaine qui nous intéresse, la présence de la basilique est si écrasante qu’elle occulte facilement l’existence d’un champ de repos pour les dyonisiens. Ouvert en 1806 à la place de l’ancien cimetière Saint-Rémy, ce cimetière de 11,5 hectares fut la nécropole de la ville avant l’ouverture du cimetière intercommunal des Joncherolles, que Saint-Denis partage avec les villes de Saint-Ouen, Épinay-sur-Seine, Villetaneuse et Pierrefitte-sur-Seine.
Cimetière de banlieue par excellence, avec la tristesse qui lui est associé les jours maussades, le lieu fut régulièrement utilisé par le cinéma. C’est ici que débute le Pacha de Georges Lautner avec Jean Gabin. Pour les fans, ce fut également le lieu de tournage du clip de Plus grandir de Mylène Farmer.
Pourtant, il ne faut pas se limiter à cette première impression et sa visite se révèle en réalité très intéressante. Ville populaire depuis le XIXe siècle, le passé de Saint-Denis est ancré dans ses tombeaux : traditions ouvrières, évocations de la « banlieue rouge », forte présence du parti communiste… Traditions populaires également, qu’il faut dénicher ça et là dans les divisions. Mais l’âge vénérable de la nécropole (il n’est finalement le cadet du Père Lachaise que de deux ans !) nous donné aussi de bonnes surprises : celles de trouver des tombeaux anciens sauvegardés, et une statuaire assez riche.
Curiosités
Le cimetière contient quelques tombeaux remarquables :
La statuaire est présente, même si elle ne concerne pour l’essentiel que des figures locales. On distingue :
- Deux œuvres d’Eugène Faivre sur les tombes Burlot dit Bural et sur Emma Prevost-Choppard
- Le buste en bronze de l’instituteur Guilleminot par C. de Bleuzen
- Le buste en bronze du jeune René Vanden-Daele par A. Azori
- Un médaillon signé Girard sur une tombe très abîmé (sépulture Puissan)
- Un ange de facture contemporaine sur une tombe anonyme par Léon Dutheil.
- Le médaillon d’Arthur Legras
La tombe de "Emile Cottin, administrateur des colonies et Jeanne Baudouin, son épouse, victimes du naufrage du paquebot l’Afrique le 12 janvier 1920 ». Ce naufrage, au large des Sables d’Olonne, près de l’Ile de Ré, fit 565 victimes.
Au centre du cimetière, autour d’un rond-point, sont rassemblées les tombes et les monuments commémoratifs des communistes et résistants dyonisiens.
Célébrités : les incontournables...
... mais aussi
Alexandre ABREMSKI (1903-1938) : ouvrier en bâtiment d’origine juive, il fut membre de la CGT dont il démissionna en 1930. Lors de la rupture entre Jacques Doriot et le PCF, il se fit élire conseiller municipal de Saint-Denis aux côtés de celui-ci (1934), puis le rejoignit au sein du Parti populaire français (PPF), qui prit peu à peu un virage fasciste. Il en fut membre du Bureau politique, chargé des questions syndicales. Alexandre Abremski est donc un des nombreux exemples de militant de gauche ayant viré vers le fascisme français pendant la guerre. Il mourut dans un accident de la route. Dans le même tombeau repose sa sœur, la chanteuse Renée Dyane FAUCHON-GAVEL (Georgette Abremski : 1899-1991).
Le peintre et aquarelliste Louis-Félix Georges BONHOMME (1870-1924), qui suivit les cours de Gustave Moreau avec Georges Rouault, dont il fut très proche en terme d’inspiration et de style expressionniste. On peut voir dans l’Hôtel de Ville de Saint-Denis trois de ses fresques allégoriques.
Auguste GILLOT (1905-1998) : cadre du parti communiste
français, il exerça d’importantes responsabilités dans la Résistance et dans le parti. Délégué à la conférence nationale du PCF en 1934, il fut chargé de mener la lutte contre la dissidence Doriotiste à Saint-Denis. Fidèle au parti pendant la Seconde Guerre mondiale, il est chargé de reconstituer clandestinement le Secours Populaire en 1940. Il fut désigné pour représenter le PCF au sein du Conseil national de la Résistance à partir d’août 1943. Après la Libération, il siègea à l’Assemblée nationale consultative. Il intégra le Comité Central du PCF en juin 1945, et fut, de 1945 à 1971, l’un des maires communistes « historiques » de Saint-Denis.
Alexandre Edme MÉCHIN (1772-1849) : chaud partisan de la
Révolution française, il s’enrôla parmi les Jacobins, puis les Girondins (ce qui l’obligea à fuir). Revenu à Paris après thermidor, il fut nommé chef de cabinet du ministre de l’Intérieur, Pierre Bénézech. En 1798, il fut arrêté à Viterbe (Italie) au cours d’une émeute alors qu’il se rendait à Malte comme commissaire du Directoire exécutif. Rentré en France, il fut alors successivement préfet des Landes, de la Roër, de l’Aisne et du Calvados. En 1809, il fut créé baron d’Empire, mais fut révoqué lors de la première Restauration en 1814. Préfet en Ille-et-Vilaine pendant les Cent-jours, la seconde Restauration le mit à nouveau au chômage. En 1816, il se fit élire député libéral de l’Aisne : il fut un opposant aux gouvernements de la Restauration, et oeuvra à la prise du pouvoir par Louis-Philippe. Il fut remercié par ce dernier par l’octroi de la préfecture du Nord. On lui doit également une traduction en vers des Satires de Juvénal.
Commentaires